Il est vrai que je suis pleine de manies, de tocs, que j’ai quelques particularités détonantes, dont celle d’attribuer une musique à des personnes que je connais ou pas, mais qui me touchent d’une manière ou d’une autre. Il y a aussi une chose que j’aime par-dessus tout, mais ça vous le savez déjà (si si, j’ai l’espoir que parmi-vous il y a des lecteurs qui me suivent) les hommes à cicatrices avec de grosses épées… Je m’égare, je m’égare, ceci est une autre histoire…. Parmi toutes mes « pathologies », oui je sais, je suis charmante, j’ai des chiffres fétiches, comme bien des mortels je vous rassure et le 17 est l’un d’entre eux. Tout ce ramdam me direz-vous juste pour exprimer que je suis extrêmement touchée que le Donjon Monsters – Un héritage trompeur de Bertrand Gatignol, Joann Sfar et Lewis Trondheim paru aux éditions Delcourt porte ce numéro. Si vous êtes toujours là à me lire c’est que vous êtes vraiment héroïques, courageux, un peu fous ou simplement sympas ! Evénement particulier pour ce numéro, il a été édité de deux façons. Une version classique, mise en couleur par Walter, et une autre d’un format plus grand, avec une couverture mate toute en noir et blanc. N’allez pas croire que ces deux moutures sont les mêmes. Bertrand Gatignol les a élaborées diversement. Pour celle au format familier il est resté dans la lignée traditionnelle, pour l’autre il a repensé tout le noir dans chacune des cases pour un rendu plus équilibré comme dans sa série les Ogres-Dieux. Ce sont donc deux ouvrages pensés et conçus différemment.
Dans ce volume nous retrouvons Papsukal qui vient d’hériter d’un gigantesque et insolite château ainsi que des terres qui vont avec. Ce sont les propriétés du mage trépassé Blaise Pilozzi. S’il lui a légué ses biens, il lui a aussi offert en cadeau : sa magie. Abreuvé de cet honneur et de ce pouvoir, le chat-canard se sent pousser des ailes. Il comprend fort vite et à ses dépens que ce présent magique lui assigne une contrepartie. Son ami l’enchanteur prend possession de son corps dans son sommeil et lui fait accomplir des joyeusetés impromptues. Pour révoquer ce sort, notre héros va faire appel à une sorcière pestilentielle qui a justement l’incongru Blaise dans le collimateur. Si le désenvoutement était chose simple ça se saurait, le chevalier à bec va s’y casser les dents et prendre un sacré coup de chauffe.
J’avoue ne pas être une experte de la série Donjon. J’en ai lu la plupart, en ai aimé quelques-uns et un peu moins d’autres. Malgré tout, je porte un intérêt tout particulier aux Donjon Monsters. Je ne pense pas avoir été déçue par l’un de ses titres. J’apprécie leurs récits qui relatent les aventures de personnages secondaires de cette grande fresque d’heroic fantasy. Sfar et Trondheim m’ont captivée avec leurs scénarios et chacun des dessinateurs invités a su les mettre en images avec émotion et me faire voyager dans divers paysages. Il faut bien se l’avouer, nos deux auteurs ont été accompagnés par de sacrés noms de la bande dessinée : Mazan, Bézian, Kéramidas, Yoann, Carlos Nine ou encore Guy Delisle font partie de cette lignée d’artistes qui ont pris possession de cette grande œuvre qui n’en finit pas de nous amuser.
Pour en revenir au tome 17, je ne vous cacherai pas que ma préférence va à la réalisation sans coloris. J’y ai retrouvé le trait reconnaissable entre tous de Bertrand Gatignol. Le noir devient profond et soutenu et l’édition en grand format rehausse la beauté de la composition graphique. A vous de faire votre choix et pourquoi pas craquer pour les deux ? Moi j’ai clairement été bluffée, j’ai dû regarder à deux fois croyant ne pas avoir le même album entre les mains. Papsukal, Blaise, la sorcière et les multiples seconds rôles qui traversent ces péripéties vous attendent et croyez-moi ou non, vous n’allez pas vous ennuyer. Armez vos rapières et mettez-vous à courir, une horde d’acharnés est à vos trousses….
Chronique de Nathalie Bétrix


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