Aujourd’hui, j’ai envie de vous faire partager l’admiration que j’ai pour le mangaka, Masasumi Kakizaki. Le premier volume de son diptyque Les amants sacrifiés vient de sortir aux éditions Ki-oon. Cette histoire est l’adaptation d’un film sorti en 2020, écrit par Ryusuke Hamaguchi, Tadashi Nohara et Kiyoshi Kurosawa, que ce dernier réalisa. Il remporta la même année, le Lion d’argent du meilleur réalisateur à la Mostra de Venise.
J’ai découvert les lignes acérées et tranchantes de ce virtuose du dessin avec la série western en cinq tomes Green Blood. Fascinéepar son trait et la force extrême qui émane des figurants et des décors, j’ai dévoré tous les titres de l’artiste traduits en français. Après le western, j’ai englouti dans la foulée les sept tomes élaborés avec George Abe, Rainbow chez Kaze. Une intrigue qui se déroule après-guerre au début des années 50, sept jeunes tentent de survivre en prison, au milieu d’un Japon dévasté. Le scénario est d’une noirceur redoutable. Suivra le cycle Bestarius qui mélange de manière subtile, le fantastique et l’Empire romain. Cet homme talentueux a conçu en 2010 le one-shot Hide out. Comme il l’explique dans la postface de son ouvrage, c’est un hommage au genre horrifique qu’il affectionne, autant au cinéma qu’en littérature. Sa principale influence n’est autre que le maître de l’horreur : Stephen King. Il sera traduit en français en 2011.
Western – historique – fantasy – horreur, ce touche à tout a une caractéristique dont il ne s’écarte jamais : la qualité de son graphisme. Ceci est indiscutable !
« Les amants sacrifiés » a pour cadre le début des années 40. La guerre approche et Yuzaku, président de l’entreprise internationale Fukuhara est un homme qui aime vivre avec son temps.
Les gouvernants souhaitent que le pays reste ancré dans les traditions et voient d’un mauvais œil les individus enclins à la modernité. Lui et sa femme Satoko, se démarquent par leur mode de vie à l’occidental et les autorités commencent à les défier pour qu’ils redeviennent raisonnables. Taiji, leur ami d’enfance, engagé par l’armée, ne cesse de les harceler et d’intimider Yuzaku afin qu’il se plie aux décisions prises par la nation. Les frontières se ferment et pour pouvoir continuer à travailler, il est obligé de se tourner vers de nouveaux circuits d’approvisionnements. Malgré l’inquiétude de sa femme, il décide de se rendre en Mandchourie. A son retour, Satako, pressent que son homme lui cache quelques vérités concernant son voyage….
Chaque nouvelle sortie de Kakizaki me met en ébullition. Dès que mon regard se porte sur l’une de ses planches, mes yeux s’illuminent de mille feux. Je les contemple inlassablement, je m’y noie à oublier de respirer. Je me perds pendant des heures à examiner chaque partie. Je tourne les pages, revient en arrière, pose le manga, le reprend et recommence convulsivement…
Ses personnages ont toujours une personnalité captivante. Il a un sens aigu du détail et un procédé implacable pour nous faire ressentir toutes les émotions. Que ce soit la peur, l’angoisse, la colère, la haine, tout est parfaitement convaincant. Les décors dans lesquels ses protagonistes déambulent, sont d’une incroyable beauté. Il sait tirer profit de son art graphique, pour nous faire croire que le vent, les tempêtes, la pluie, un coup de poing, une épée ou une balle perdue nous touchent et nous transpercent.
Je n’ai pas fini d’apprécier les créations de Masasumi Kakizaki, Il a une façon bien personnelle de m’hypnotiser et de m’emporter à travers des contrées que je souhaite explorer avec tous les acteurs qui m’ont assiégée avec émerveillement et satisfaction tout au long de mes interminables lectures…
Indéniablement un grand nom de la bande dessinée Japonaise qui ne peut laisser personne indifférent. Je ne peux que vous recommander de vous plonger dans une de ses œuvres. Cependant, je ne vous promets pas que vous allez réussir à vous en relever !
La perfection a un nom : Masasumi Kakizaki !
Chronique de Nathalie Bétrix
