POCAHONTAS

Si vous avez eu, comme moi, l’occasion de saliver l’an dernier devant les premières planches dévoilées dans le cadre de l’exposition Malouine intitulée  Sagas indiennes, vous attendiez certainement cet album de pied ferme.

Pocahontas est une réalisation de Patrick Prugne pour Daniel Maghen, un one shot épais et un sublime objet. Il est complété par un cahier graphique époustouflant qui témoigne de l’important travail de recherches réalisé par un spécialiste délicat qui nous enchante depuis tant d’années avec des images du Nouveau Monde fascinantes et criantes de réalisme.

Après tant d’opus consacrés à cette passion et l’accumulation d’une colossale documentation, Pocahontas, la légende indienne résonnait un peu comme une évidence dans le parcours de l’aquarelliste. Il y a dedans tous les ingrédients pour séduire les amateurs d’une thématique appréciée et populaire : l’arrivée des Anglais, l’expédition en bateau, la construction d’un fort, une fine approche des Indiens, de leur mode de vie, de leur culture mais aussi des personnages bien bâtis, facilement identifiables que l’on a envie de suivre dans un récit qui s’étale sur plusieurs années.

Patrick Prugne s’est jeté à corps perdu dans cet excitant projet s’autorisant simplement une contribution dans le magnifique Go West édité par Grand Angle, afin d’illustrer magistralement un script sur mesure signé par son vieux complice Tiburce Oger.

Il a pris le temps nécessaire pour chercher et gratter afin d’offrir à son public une BD qui a la particularité de fournir des éléments plausibles. Il faut bien admettre qu’au fil des années, l’Amérindienne a fait couler beaucoup d’encre et suscité bien des fantasmes que le bédéiste a pris le soin d’éclipser. Nous avons bien affaire à une gamine et non à une femme d’une vingtaine d’années.

L’auteur a romancé son histoire et sélectionné des moments importants, il propose une narration à la fois cohérente, plaisante, terrible et sans équivoque. L’issue est très claire, le rouleau compresseur est en marche. Ne cherchez pas les failles, il n’y en a pas. Le créateur connaît le sujet sur le bout des doigts, les armes et les uniformes sont rigoureusement reproduits.

La prestation graphique est tout aussi convaincante. L’artiste joue sur les cadrages et les angles de vue, son découpage est inspiré et varié. Son dessin à la mine de plomb est précis, le trait affûté et sûr. Le travail sur la couleur directe est épatant. Il génère de la douceur, de la luminosité, de la poésie, mais également une subtilité singulière qui contraste efficacement avec une époque brutale.

Si vous avez besoin d’évasion, de nature et d’authenticité, Pocahontas est la bande dessinée qu’il vous faut. Elle est exécutée par un ténor de la bd historique, aussi habile pour concevoir de solides scénarios que pour nous émerveiller avec des protagonistes et des décors qui nous embarquent inéluctablement.

Les planches sont visibles à la galerie Maghen jusqu’au 5 novembre, alors si vous êtes dans les parages, foncez!

Chronique de Stéphane Berducat

©Éditions Daniel Maghen, 2022.

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