Negalyod

Parlons BD, parlons bien ! Le tome 1 m’a scotchée au plafond, le tome 2 a confirmé le statut hors norme de Negalyod, de l’exceptionnel Vincent Perriot. Né à Olivet dans le Loiret, l’auteur a réussi la prouesse d’avoir écrit un scénario brillant, récompensé par le prix Saint-Michel, et de l’avoir traduit en de somptueuses planches dessinées par lui-même et magnifiées par les couleurs de Florence Breton (Le Monde d’Edena, de Moebius).

Ce roman graphique, édité par Casterman, nous plonge dans un monde de science-fiction où l’homme fréquente, élève, dresse les dinosaures. Il évolue sur une planète aux étendues sableuses proches de « Mad Max » ou « Dune ». Ici, point de guerre du pétrole ou d’épice puissante. La ressource clé, c’est l’eau. « Le réseau maitrise l’eau, le réseau maitrise l’homme ».

 Des millions de pompes à eau tapissent les deux-tiers d’une planète désertique pour irriguer les villes d’en haut. La rébellion gronde mais les machines, au pouvoir, sont sans pitié. Au cours du tome 1, Jarri Tchapalt, berger du désert de Ty, veut venger son troupeau de chasmosaures, foudroyé par un camion météo. Au côté du grand Kam et de sa fille, Korienzé, il se lance dans une mission impossible, détruire la tour réseau, système central des canaux qui détournent toute l’eau disponible. « Le dernier mot », deuxième tome de Negalyod, ouvre le début d’un nouveau cycle, postapocalyptique. Brusque montée des eaux, immenses vaisseaux cargo d’évacuation, capitaine nihiliste, champignons atomiques… Malgré le cataclysme généralisé, un groupe a trouvé refuge sur un bateau forêt, où la vie est rythmée par des cérémonies sacrificielles de basilosaure… Jarri et Korienzé ont eu deux jumelles, Naneï et Iriana, qui ont grandi. Korienzé est partie depuis des années. Et un livre obsède Jarri. Un bouquin qui permet de traverser l’espace et le temps. A l’aube de combats épiques, il lègue le livre mystique à ses filles et part chercher Korienzé…

Le dessin, fabuleux, est fouillé, précis, détaillé, mais aussi très équilibré. Toute la palette de couleur est utilisée avec soin, participant pleinement à nous embarquer dans cet univers où les orangés côtoient les turquoises, puis laissent place à des verts tranchés, des bleus profonds, etc.

L’artiste laisse libre cours à une imagination débridée, peuplant les pages de puissants dinosaures de toutes tailles, détaillant une infrastructure gargantuesque capable de se régénérer, déclinant une architecture improbable entre ciel et terre, valorisant la nature résiduelle, et nous amenant jusque dans l’espace… Les images et couleurs nous rappellent forcément l’œuvre de Moebius, les BD d’aventure et de cowboy. Le one shot est très généreux. Le découpage profite souvent de la verticalité de l’album grand format pour nous offrir des plans démesurés. Il nous offre des pleines pages et doubles pleines pages à couper le souffle. Cette histoire incroyable est une ode à la préservation de ce qui reste de vie sur la Terre, un hymne à l’amour et à la liberté. Vous l’aurez compris, mon admiration est sans borne, et je vous souhaite autant de plaisir que moi à découvrir ces albums… Et à y revenir….

Chronique de Mélanie Friedel – Huguet.

©Casterman, 2022.

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