Anlor est l’invitée d’honneur du festival Bulles en Val à l’occasion de sa vingtième édition. Pour célébrer l’événement, les organisateurs ont préparé une rétrospective impressionnante et dense de son parcours dans la bande dessinée. Ce sont 10 années créatives, un parcours unique composé de jolies collaborations, des prises de risque évidentes, des choix audacieux et variés qui sont mis en relief ici.
La manifestation s’ouvre sur l’affiche du festival concoctée spécialement par la dessinatrice, on y retrouve de nombreux clins d’œil, des références évidentes qui séduiront à coup sûr les amateurs de bande dessinée qui se retrouveront en masse à l’espace Lanson entre 10h et 18h samedi 26 et dimanche 27 février 2022 ou un peu avant directement à la bibliothèque municipale de Saint Denis en Val où elle est visible depuis quelques jours.
La trilogie Les innocents coupables produite avec le brillant Laurent Galandon se dévoile rapidement avec la couverture de la trilogie et quelques planches qui mettent en avant un dessin semi-réaliste fin et léger qui complète idéalement une série historique rude et saisissante éditée chez Grand Angle.
On part ensuite en Europe de l’Est avec quelques extraits de l’inoubliable chef d’œuvre en 2 tomes intitulé « Amère Russie », réalisé avec Aurélien Ducoudray, scénariste, photographe et journaliste parti pour cette histoire d’un fait divers dont il a su tirer un récit touchant, humain et terrifiant. Les planches cernées judicieusement de cadres en bois clair laissent admirer des découpages inventifs et des personnages atypiques et attachants.
On passe ensuite de la tragédie à l’humour avec « à coucher dehors » seconde collaboration du tandem, une fable contemporaine rafraichissante enthousiasmante, dynamique et amusante. On peut cette fois contempler une mise en scène rythmée et un encrage puissant. L’aventure se poursuit toujours chez Bamboo avec l’auteur castelroussin pour Camp poutine, l’histoire stupéfiante d’une supercherie estivale dans laquelle ils traitent avec malice de l’embrigadement et du culte de la personnalité.
Les planches exposées mettent en lumière un travail sur le trait bluffant et des personnages singuliers qui nous accompagnent longtemps après la lecture.
Arrive ensuite le clou du spectacle avec les planches de « Ladies with guns » chez Dargaud, un western au féminin prévu en 3 volets conçu par le très précis Olivier Bocquet et sublimé par la coloriste Elvire de Cock dont la présence au salon constitue une excellente surprise.
Il s’agit d’héroïnes relativement mal barrées qui vont décider d’unir leurs forces, de faire acte de sororité pour sortir d’une situation compliquée.
La scénographie souligne la richesse du projet en exposant parfaitement ses qualités. On en prend plein les yeux avec des cadres noirs élégants en vis-à-vis qui soulignent la précision des storyboards d’Anlor, sa science des détails et son encrage racé. La prestation est explosive et jubilatoire. Ça pétarade, ça disperse et ça ventile. Les étapes sont claires, on est intelligemment plongés dans le processus créatif de l’album. On part de la couverture en noir et blanc et on observe au fil de la visite les recherches, crayonnés, storyboard et versions encrées qui défilent avec fluidité, aisance offrant une belle récréation.
Les vitrines disposées devant les panneaux permettent de s’extasier devant les pages colorisées et d’apprécier comme il se doit l’importance d’un savoir-faire décisif.
Pour cet anniversaire, Jean Pierre Meunier et Gilles Heccan ont été particulièrement inspirés. Leur présentation du travail d’Anlor est convaincante. Elle ravira les bédéphiles les plus exigeants grâce à sa mise en place astucieuse. Elle consacre logiquement une artiste prometteuse et brillante à qui l’on peut déjà sans prendre trop de risques prédire une longue et très belle carrière.
Chronique de Stéphane Berducat.

« Amère Russie »




A coucher dehors









Ladies with guns










