Aujourd’hui, nos relations sociales s’amenuisent, on nous pousse toujours vers plus d’individualisme et de rejet de l’Autre. Je vous propose donc un manga qui va vous permettre de regarder cet autre avec un œil nouveau. Une série de fables dont les morales concordent toutes vers la grande idée que l’on peut vivre et être plus fort ensemble malgré nos différences. Amis de tous poils, je vous propose de tourner les pages de Beast Complex édité par Ki-oon.

Difficile de faire un résumé de ce manga, d’abord parce qu’il est toujours en cours de parution, mais aussi parce que chaque chapitre est une histoire à part entière. Nous voici dans un monde où les humains ont été remplacés par des animaux anthropomorphisés. Si vous vous attendez à retrouver une ambiance un peu Disney, oubliez de suite car ici, on fait bien la distinction entre herbivores et carnivores. En effet, tous vivent dans la même ville, mais se croisent et se méfient les uns des autres. Les carnivores ont appris à se contenter de repas sans viande, mais leur instinct de prédateur n’attend qu’une occasion pour surgir.

Au milieu de cette ville, nous allons donc croiser le chemin de duos étranges, pour qui les différences apportent du relief à leur relation. Nous rencontrerons des paires aussi improbables que le lion et la chauve-souris, la louve et le chameau ou encore le cochon taxidermiste et le paon policier. Car oui, les relations herbivores/carnivores sont souvent au cœur de ces histoires, mais elles sont surtout teintées des nombreuses facettes de l’esprit humain. Ces animaux nous font traverser une galerie de sentiments que l’on a habituellement tendance à juger et condamner. Voir ces personnages si opposés lutter contre leurs préjugés et le formatage social pour tenter de se comprendre est inspirant. N’espérez pas un « Happy End » à chaque fois, mais juste une note d’espoir toujours présente.

Itagaki Paru avait déjà écrit dans cet univers avec l’excellente série Beastars (Ki-oon). La lecture de cette dernière n’est pas nécessaire pour comprendre Beast Complex, mais certains personnages sont communs et leurs interactions en découlent.

Ce manga fait partie des rares perles qui sortent à destination du grand public. L’auteur prend vraiment un malin plaisir à nous montrer les aberrations de nos aprioris et de nos divisions aussi illogiques que destructrices. Tout en nous faisant la morale, il nous montre un chemin meilleur où l’autre est un égal quels que soient ses idées, son physique ou ses goûts.

Le graphisme est rapide et efficace, les animaux sont identifiables en quelques traits. L’ensemble est souvent très épuré laissant peu de place aux fioritures pour se concentrer sur l’essentiel que sont les personnages que l’on suit. Pourtant, l’auteur sait aussi nous placer au centre d’une scène complexe et détaillée qui permet de contempler toutes les facettes du protagoniste, de le voir tel qu’il est. Enfin, sans jamais réellement nous la montrer, ni nous en parler, on ressent l’obscurité qui règne et la peur continue qui agit sur tous les habitants.

Beast Complex se consomme d’une traite ou par petites lectures, un chapitre à la fois. Il peut être lu dans l’ordre ou pas selon vos envies.

Bonne lecture à tous.

Chronique de Benoit Laurent.