Que c’est dur la vie lorsque l’on est une petite souris dont l’unique but est de rapporter des vivres pour le bien-être de sa colonie! Il faut faire cependant gaffe aux bêtes sauvages qui peuplent les environs car les chats et les loups ont vite fait de provoquer un carnage si l’on manque d’attention. Cette charmante comptine survivaliste qu’est Scurry nous est proposée par le génial Mac Smith aux éditions Delcourt.
Il tombe sur les résidences pavillonnaires une pluie incessante et lourde. Les bipèdes ont disparu, les habitations sont abandonnées. La nature ainsi que le monde animalier ont repris leur droit. Des mulots éclaireurs sont envoyés en repérage afin de dénicher de la nourriture. Wix fin limier et rouquin fait équipe avec Umf son balourd de copain. Leur quête est périlleuse, chaque maison qu’ils visitent est vide ou dévastée. Les réserves commencent sérieusement à manquer. Pas de bol pour Wix et son compagnon, les guet-apens imaginés par les pattes-pelues sont de plus en plus répandus. Les deux rats sont pris au piège. Ils s’en sortent de justesse et évitent de tomber sous les griffes de Titan (le mâle alpha en puissance) accompagné de sa meute car les félins malins sont également tiraillés par la faim. Un retour au terrier est immédiatement décidé.
Pendant ce temps dans sa tanière, le conseil des rongeurs se réunit. Il est mené par Orim, sa fille Pict et Resher le complotiste. Malheureusement, chaque éclaireur tarde à revenir ou disparaît. L’assemblée se regroupe pour décider de sa relocalisation en ville. Resher et ses sbires souhaitent s’installer en métropole tandis qu’Orim aimerait que des membres envoyés en reconnaissance atteignent l’autoroute où s’y trouverait dit-on, un camion rempli de provisions. Wix se porte volontaire en tant que maraudeur le plus rapide et intrépide. Ces rations providentielles permettraient d’éviter la migration. Cette situation provoque des tensions car même chez les animaux, la trahison et la conspiration sont légion.
Wix et Pict se lancent tête baissée dans cette expédition de tous les dangers, ils affronteront toutes sortes d’espèces menaçantes en espérant ne pas finir en pâtée whiskas ou en ratatouille. Derrière les clôtures des demeures se trouvent des bois inhospitaliers. A l’intérieur, il y rôde quelque-chose de bestial possédant de longs crocs, des yeux de prédateur aussi dangereux que les maîtres du ciel que sont le faucon et les corbeaux. Nos mammifères à museau pointu devront faire connaissance avec l’imprévu et l’inconnu.
Je ne connaissais rien de Mac Smith avant d’ouvrir Scurry. Cet illustrateur et concepteur indépendant prend en charge sa création de A à Z, du scénario jusqu’aux couleurs. L’histoire est très alléchante, c’est une thématique déjà vue cent fois mais il y a un petit quelque-chose en plus qui pique notre curiosité et intérêt. Le synopsis est mouvementé, il s’accorde parfaitement au rythme excitant. Le lecteur frémit à chaque page tournée. Mac Smith transpose des sentiments ou des problèmes résolument humains en apportant une touche de sensibilité plutôt bienvenue. Ce supplément subtil fait toute la différence et transforme cette fable en une lecture bondissante, poignante et notre empathie déborde pour ces minuscules créatures si courageuses. Ce qui est extra avec cette bande dessinée, c’est qu’elle est susceptible de plaire aux adultes comme aux enfants.
Smith livre une performance visuelle bluffante. Il atteint des sommets de virtuosité à l’aide de sa tablette graphique, l’illustration est phénoménale. Le dessin attachant de ce comic-book se déploie de manière envoûtante et terrifiante, c’est trop choupi ! Le stylet croque les lignes et les contours avec enchantement, la représentation sonne juste. La vitesse est restituée par des effets de flou exquis. Nous distinguons assez rapidement les gentils des méchants grâce à une mise en page incisive déployant la bonté, la naïveté de certains personnages face à la cruauté et la férocité des autres. La colorisation numérique se veut lumineuse, la retouche photo apporte un certain réalisme aux décors ou aux intérieurs. Pour finir, l’épaisse brume accentue le mystère et l’aventure de ce chef-d’œuvre.
Le neuvième art prouve de nouveau que la créativité ne se trouve pas seulement dans les célèbres studios d’animation si chers à l’oncle Walter ou John Lasseter. Parfois, un succulent morceau de fromage permet de partir dans un péril enthousiasmant qui peut se métamorphoser en une odyssée sucrée-salée à échelle de patte qui envoie la patate !
Chronique de Vincent Lapalus
Il est dans ma wish list et après un tel avis, il devrait vire rejoindre ma bibliothèque !
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super
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