Pleurez un bon coup et sortez vos mouchoirs, le temps est venu pour le « lascar » rouge de nous dire au revoir. Une des plus grandes aventures éditoriales des années quatre-vingt-dix s’achève maintenant. Le clap final tombe sur le Hellboy-verse dans BPRD Un Mal Bien Connu T2 aux Editions Delcourt. Apothéose supervisée par Mike Mignola et son collaborateur de toujours Scott Allie, le tout magnifié par Laurence Campbell aux crayons et mise en couleur par l’inégalable Dave Stewart.
L’Enfer s’est abattu sur Terre, les odgru hem sont en marche partout dans le monde. Le ogdru jahad, grand mal universel, déferle et l’humanité risque d’en prendre un sacré coup jusqu’à l’extinction. Mike Mignola réunit son triumvirat originel pour mettre un terme à sa création lancée depuis presque trente ans. Hellboy sera aidé par Sir Edward Grey (le Witchfinder) réincarné, pour mettre à bas Raspoutine et ainsi stopper ses rêves d’anéantissement total. Le complot mené par le club Osiris, pensant contrôler le pouvoir du dragon à sept têtes, sera tué dans l’œuf dans la foulée. Le trio d’insoumis tire sa révérence et sauve ce qui reste de l’humanité dans une bataille dantesque à grands renforts de prouesses pyrotechniques, de la célèbre main droite de la mort faite de pierre et de corps-à-corps.
Mike Mignola clôt sa création de manière magistrale avec panache et énergie. Univers empreint de légendes, de folklore, abreuvé de littérature fantastique, de récits d’horreur, de mystères et de surnaturel. Une atmosphère de mythes anciens et modernes pour jouer et se faire plaisir avec son personnage, là ou l’artiste commençait à se sentir à l’étroit chez les deux grandes firmes que sont Marvel et DC. Fin programmée depuis Les Germes De La Destruction par petites touches ici et là, avec toujours l’envie de rivaliser en énergie et en « punchy » déployé par le King Jack Kirby, le saint patron pour une grande majorité de dessinateurs US. Tout est passé au crible et beaucoup d’éléments en suspens trouveront une réponse, le lecteur ne restera pas sur sa faim pour ce grand final qui se veut net et précis.
Pour le dessin, trois illustrateurs se passent le relais sur ce cycle. Christopher Mitten tout d’abord, réalise les dix premières planches sur la jeunesse de Varvara. Il a déjà travaillé de manière sporadique sur quelques épisodes du BPRD, il livre une prestation ample et claire. Le suivant n’est autre que Laurence Campbell, dessinateur de Sledgehammer et des BPRD L’Enfer Sur Terre et Un Mal Bien Connu. Très familier et régulier des séries sur le groupe des étrangetés. Il emploie un style plutôt réaliste, élégant et péchu tout en respectant l’architecture graphique imposée par Mignola, les fameuses pages claires-obscures si reconnaissables du papa de Hellboy et ses bastons démentielles et légendaires. Quand au boss, il posera sa pierre à l’édifice pour les douze dernières pages comme un magnifique chant du cygne. Avec son trait anguleux et hors norme, aisément reconnaissable, la conclusion posée comme le marbre sur une pierre tombale.
Sans oublier Dave Stewart, coloriste génial. Il apporte une homogénéité à l’aide de sa pose de grands aplats de couleurs mates et une pointe de luminosité pour un effet tamisé et contrasté concernant le présent volume.
Complément Du mal Bien Connu, Delcourt incorpore la mini-série « Le Visiteur : Comment Et Pourquoi Il Resta« . Histoire touchante ou prime l’intégration d’un personnage venant d’une autre planète mais qui vit sous l’identité d’un homme. L’émotionnel est surtout mis en avant pour un final touchant, cela peut paraître anecdotique mais cela a son importance.
Nous voilà orphelins, terminées les guerres entre le bureau occulte de professeur « Broom » et la guilde de Thulé d’Adolf Hitler. Reste des milliers de pages de (re)lecture qui posent Hellboy et ses spin-offs comme des intemporels et inconditionnels du comic-book. Une page se tourne…
Chronique de Vincent Lapalus.
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