Something Is Killing The Children T5 – The Road To Tribulation par James Tynion IV, Werther Dell’Edera et Miquel Muerto aux éditions Urban Comics, lance le coup d’envoi d’un arc inédit de la nettoyeuse de l’Ordre de Saint-Georges. La tension monte d’un cran, il faut être un monstre pour en pourchasser d’autres.
L’affaire d’Archer’s Peak provoqua une vague d’agitation, Erica Slaughter a trop attiré l’attention. Son organisation souhaite que ses agissements restent secrets. Elle espère passer sous les radars, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.
Depuis les décès de son mentor Jessica et d’Aaron, Erica n’est plus protégée et finit par être exclue de la guilde. Elle devient une tueuse indépendante sans ressources. La situation ne lui paraît pas si insurmontable puisqu’elle reste la meilleure dans sa catégorie.
Sa nouvelle mission l’amène jusqu’à Tribulation au Nouveau-Mexique, c’est une ville composée de sources chaudes. Le meurtre d’une famille défraya la chronique du journal local. Gabriela Lopez dit Gabi s’en est sortie miraculeusement mais traumatisée. Ses sœurs ainsi que sa mère et sa grand-mère ont été exécutées dans des conditions extrêmes. Malheureusement pour la jeune-fille, personne ne croit à ses explications. Le soi-disant assassin n’apparaît sur aucune image, un ennemi invisible sème la terreur au sud-ouest du pays.
Cependant, Erica ignore que le grand dragon et maître de la loge du massacre à Chicago fait appel à ses «cousins» européens. Un contrat est mis sur sa tête. Le verdict est sans appel, ce sera une exécution sommaire. La liquidatrice aux yeux chelous doit faire équipe avec un flic à la ramasse et une patronne de bar caractérielle pour survivre.
James Tynion IV positionne son titre dans la veine de la pop culture horrifique, il développe une série à l’atmosphère de pures peurs primales. Le récit navigue à l’intérieur d’un univers terrifiant jonché de monstruosités si chères aux frères Duffer, de chimères infanticides que ne renierait certainement pas Stephen King sans omettre la caste d’assassins hiérarchisée façon Underworld et son héroïne principale en bout de course. En bref, l’auteur compile des recettes déjà vues cent fois avec talent. La thématique de l’adolescence est traitée de façon originale. Pour le scénariste, les cauchemars naissent à l’aube d’un âge où l’imagination des teenagers se trouve à son apogée. Le danger provient du changement des corps et des mentalités, leurs puissances donnent vie aux entités maléfiques. Ce comic-book possède toutes les qualités requises pour plaire à un public large, il s’accompagne d’un p’tit goût de reviens-y à chaque nouvelle parution. L’essentiel passe par l’action.
Werther Dell’Edera prend en charge le dessin et les finitions, lui qui signa de superbes prestations sur les albums Hellblazer : Dark Entries et The Crow : Memento Mori. La violence visuelle accompagne celle des mots, l’artiste n’hésite pas à montrer la cruauté à l’aide du gaufrier. Werther Dell’Edera injecte de la fureur et du punch à la mise en scène. Le trait élastique tranche aussi bien en souplesse qu’en flexibilité. Le crayonné expressif se manifeste lors des scènes de combats, les cases choquent. La réalité parfois crue se dépeint au scalpel et à l’agrafeuse chirurgicale, la narration ultra dynamique s’accorde à un graphisme rugueux et incisif. Elle détient la capacité de figer le temps avant que l’hémoglobine ne se mette à jaillir, voilà le parfait exemple de ce que j’appelle une illustration psychopathe. L’encrage lourd et épais magnifie les planches, le noir répond présent à chaque page. La lumière tente de faire une percée sauf que l’encre de chine ne cesse de s’intensifier. Les masses d’ombres apportent leur variété de contrastes, l’ambiance passe de l’état sombre à angoissant en un claquement de doigt. Miquel Muerto emploie une colorisation combinée. Sa composition picturale argileuse voire tempera se fond dans la chaleur torride, les contre-jours et couchers de soleil typiquement représentatifs de ce coin géographique. L’éclairage expressionniste met en relief une paranoïa violacée, la palette de couleurs s’applique dans un esprit artistique soigné.
Something Is Killing The Children s’impose désormais comme la crème dans le domaine. Buffy Summers peut aller se rhabiller et prendre une retraite bien méritée car la badass Erica Slaughter est dans la place.
Chronique de Vincent Lapalus.


© Urban Comics, 2023.