De Cape et de mots, écrit par Flore Vesco, est sorti en juin 2015 sous la forme d’un roman jeunesse. Aujourd’hui, nous avons le privilège de découvrir la version illustrée, qui a pris vie sous le trait éclatant de Kerascoët aux éditions Dargaud.
Il fut une autre époque, où les jeunes filles de bonnes familles devaient être complaisantes et disciplinées. Serine, l’aînée d’une fratrie de six bambins est l’unique fille. Elle n’est pas vraiment à ranger dans cette catégorie de jouvencelles. Elle met de l’animation dans toute la demeure par sa nature pétillante et survoltée, ce qui désespère sa mère, mais amuse son père. La marâtre n’a qu’une ambition, la caser et la gamine, celle de se faire une place au château à côté de la reine. Au décès de son cher papa, il n’en faut pas davantage pour décider la demoiselle d’aller faire sa place au côté des dames de compagnie de la souveraine.
Ses premiers pas à la cour ne sont certes pas ceux dont elle rêvait, la voilà lavandière ! Mais c’était sans compter sur l’énergie et la détermination de la miss qui lorsqu’elle veut quelque chose l’obtient. Elle se retrouve à jouer des coudes pour intégrer la fine équipe des domestiques au service de la dame de maison ! Si ses manières ne plaisent pas à tout le monde, les hautes sphères se délectent de son petit grain de folie. Serine est intelligente, dégourdie et curieuse, ce qui lui permet de mettre à jour une conspiration contre le roi. Le secrétaire particulier de sa majesté et son épouse sont de mèche, ils espèrent le renverser. Aidée par Léon, apprenti bourreau, elle essaie de déjouer le complot. Malheureusement, la mégère et le scribe démoniaque ont plus d’influence dans la résidence que la servante et elle se fait renvoyer illico presto. Va-t-elle baisser les bras pour autant ? Que nenni. Elle s’affuble du costume de bouffon et revient à l’assaut sous les traits de ce saltimbanque, premier de ce nom au palais. Elle est tenace la guêpe et ne lâche rien. Déjouer les coups montés pourrait bien devenir sa spécialité.
Cet album est dynamique et percutant. Notre héroïne est vive et perspicace. Elle est loin de l’image que l’on se fait des femmes soumises et dociles de cette période. Garçon manqué et téméraire, elle est en avance sur son temps. Si on peut y distinguer des allusions « féministes », cela reste avant tout un récit d’aventure distrayant et loufoque, sans connotations militantes. Kerascoët a effectué un travail extraordinaire sur cette bande dessinée. Le découpage et la mise en page nous offrent une lecture captivante. Tous les personnages sont attachants et ont de la personnalité. Les décors, les paysages et ornements sont composés d’infimes détails, ce qui nous pousse à passer de longues minutes à scruter chaque page. Le trait est soigné et les couleurs sont chaleureuses. L’ouvrage est intrigant et il nous attire par l’esthétisme de sa couverture !
Dans la profusion des nouveautés jeunesse qui paraissent chaque année, De Cape et de mots sort clairement du lot. Ce one-shot délirant, rocambolesque et mystérieux plaira aux enfants, mais également aux parents. Arrivé à son terme, on se met fortement à souhaiter que l’intrigue ne se termine jamais. Mais voilà, ne dit-on pas que « toute bonne chose a une fin ? ».
Chronique de Nathalie Bétrix


©Dargaud, 2022.