Eh oui, c’est fini, il n’y en aura plus. La fable animalière de Mac Smith s’achève avec Scurry T3 – La Malédiction des Ombres  aux éditions Delcourt. L’artiste croque un dénouement vibrant alors poursuivons sans plus attendre !

Wix et Pict longent la rivière sur une embarcation de fortune. Ils ont fui le royaume des castors et le déluge à cause de l’effondrement d’un barrage. Les mammifères à queue plate n’auront été qu’une perte de temps et d’aucun secours. Nos héros doivent absolument regagner leur refuge car les réserves de nourriture s’amenuisent sérieusement, le moral est au plus bas.

Ils sont pourchassés par le loup Erebus accompagné de sa meute d’enragés. La faune toute entière crève de faim. Les bas-instincts reprennent le dessus, il faut se battre ou être dévoré. Les rongeurs trouvent les cadavres de leurs congénères éclaireurs envoyés à la ville. Ils ont été irradiés, l’humanité a payé le prix de son arrogance. La situation est consternante. La priorité est d’atteindre la colonie, ils espèrent renverser Resher et ses rêves de conquête. La menace peut surgir de n’importe quel côté, du ciel, de la terre ou de l’eau.

Pict et Wix ne désespèrent pas de découvrir le Saint-Graal, à savoir des provisions. Leurs prières seront entendues et le salut pourrait venir de la rencontre fortuite avec le marsupial Grigori. L’opossum leur conte la légende oubliée de la Protectrice de la forêt. La communauté du mulot ne devra pas baisser les pattes devant l’adversité. Elle s’armera de courage, ira battre la campagne pour se hasarder dans les tréfonds des bois afin d’affronter les épreuves. Alors advienne que pourra…

Mac Smith signe un épilogue sensationnel. Scurry est un pur divertissement enchanteur, l’aventure avec un grand A. Ce titre «sleeper» dont on attendait rien au départ nous aura scotché puis chamboulé jusqu’à la fin, son succès est amplement mérité. On frémit pour ces bestioles attachantes. L’univers se déploie de manière riche et variée, le casting s’étoffe de chapitre en chapitre. Beaucoup d’espèces connues viennent faire un p’tit coucou, ce qui n’est pas pour nous déplaire bien au contraire. Smith s’octroie le temps de développer son synopsis et les différents protagonistes. L’action s’enchaine go fast et nous propulse à l’intérieur d’un monde incroyable. Le récit ne s’essouffle pas une seconde et ne connaît aucune baisse de régime. Il gagne en profondeur et portée philosophique à l’aide de sujets universels qui parlent au lecteur. C’est une source inépuisable ! Il n’y a pas de place pour le pessimisme, autant favoriser l’altruisme.

Graphiquement, l’illustrateur Smith se surpasse et atteint des sommets de grâce. La fulgurance est un don chez lui. Son art se déguste tel un met d’exception à la fois doux, délicat et délicieux. La représentation côtoie la technique, le trait s’applique avec doigté. Le dessin se hisse à un haut niveau d’habileté, le crayonné adhère à la page avec une maîtrise inégalée. La mise en scène déferle de façon ultra dynamique, le découpage gagne en panache et vélocité lorsque le danger surgit au coin d’une case. La pigmentation n’est pas en reste puisqu’elle vient poser une deuxième couche de sublime sur les planches. Les nuances mettent en évidence un contraste lumineux qui claque, elles embellissent une colorisation surbrillante et fougueuse. En bref, ce graphisme cinq étoiles pète la classe. Vous en reprendrez bien pour le dessert ?

 Scurry remplit son cahier des charges. Ce comic-book n’est pas qu’une simple distraction mais une véritable bouffée d’oxygène, une lecture récréative et galvanisante. La trilogie aura durablement marqué les esprits des amateurs de péripéties et de rebondissements ainsi que le Neuvième Art au fer rouge. Ah, on me souffle dans l’oreillette qu’un nouveau cycle serait en préparation outre-Atlantique. Info ? Intox ? Intéressant !   

Chronique de Vincent Lapalus.

©Delcourt, 2022.