HEIDI vs ZOMBIES

Qui a dit un jour que le petit pays qu’est la Suisse était un endroit calme, propre et où il ne se passe jamais rien ? Cette personne n’a certainement pas rencontré nos deux lascars à l’imagination pittoresque et délirante : Jean-Paul Cardinaux et Xavier Ruiz. Heidi vs Zombies est initialement un projet de long métrage de cinéma. Pour ajouter un support visuel à leur dossier, ils ont souhaité adapter le scénario en bande dessinée. Duo de réalisateurs établis à Genève, ils sont actifs depuis bientôt vingt ans dans le cinéma. Pour donner vie à leurs personnages, ils ont eu la bonne idée de faire appel à JP Kalonji, auteur de talent, résidant également dans la ville genevoise. Ce trio explosif va mettre à mal, avec beaucoup de panache, une des icônes de ce charmant pays, la bien nommée « Heidi ».

Heidi devenue adolescente, comme toutes les jeunes ados de son âge ( !?), aime dégommer tout ce qui bouge sur sa console de jeux ! Sa tante, avec qui elle vit, rentre à l’aube après une nuit arrosée. Nauséeuse et gratifiée d’une belle gueule de bois, elle apostrophe, avec peu d’élégance, la nénette pour qu’elle se radine illico presto avec un café et de l’aspirine. Aujourd’hui, elle a une grande nouvelle à annoncer à sa nièce, Monsieur Seseman vient de divorcer et l’invite à emménager chez lui. La tantine rappelle à la demoiselle que celui-ci a une fille et qu’il ne veut pas avoir dans les pattes une autre gamine et encore moins si elle lui apporte une mauvaise influence… Pas de soucis, notre Heidi n’a qu’à s’en retourner vivre chez son grand-père.

Arrivées au « Dörfli », elles sont accueillies par l’ami Peter, ravi de retrouver son amie. On ne peut pas dire que cette « surprise » ait le même effet sur le vieux bonhomme. Être face à sa petite fille et à Odette, n’a pas vraiment le don de le remplir de joie…

La nuit dernière, non loin de là, il s’est passé d’étranges événements à la base militaire de Bad Ragaz. Dans une cellule, un Helvète à l’air hagard, ne s’est pas contenté de boulotter le morceau de jambe qu’on lui a apporté pour le dîner. Ce jour-là notre prisonnier a préféré se régaler de chair fraîche. Ni une ni deux il a bâfré son geôlier ! Quand pendant des années on n’ a mangé que de la nourriture avariée, on prend très vite goût à de la viande de premier choix.

Dans les montagnes, le calme tant apprécié est sur le point de se dissiper… Au petit matin, Peter retrouve un mouton éventré. Lui et le grand-père comprennent qu’il se passe une chose extrêmement grave dans les hauts pâturages. L’aïeul ordonne aux enfants de rester planqués au chalet, avant de se rendre dans sa base secrète pour y dégoter tout son arsenal. Heidi, de son côté oblige le pauvre bougre à lui révéler ce qui est en train de se passer dans les sommets… Un évènement secret et bien gardé depuis 1940, refait surface ce qui n’est vraiment pas une bonne nouvelle.

C’est à ce moment-là que tout part en cacahuète. Mais où sont-ils allés chercher une telle idée ? C’est carrément jubilatoire ! Entre World War Z et Bienvenue à Zombieland, on se laisse emporter comme si on était pris dans un incroyable tsunami. Pas de répit pour nos amis, il ne faut rien lâcher, en tous cas pas avant que le dernier zombie ne soit éliminé. Énergique et hilarant, il est bien audacieux de s’en prendre à un mythe aussi typiquement Suisse et d’en réaliser une combinaison aussi fantasque ! On reconnaît bien dans tout ça le côté attrayant de la mise en scène cinématographique. S’il n’y a pas vraiment matière à comparer, j’ai apprécié dans cette œuvre tout ce que j’ai pu savourer dans les quatre tomes de la série de l’auteur américain Skottie Young I hate Fairyland. Comics totalement givré où il n’y a pas de limite à l’absurdité. Jouissif ! Kalonji apporte sa touche graphique avec classe et je n’aurai pas pu espérer mieux. Bien loin du style de sa dernière réalisation sortie en 2014 aux éditions Delcourt In bed. On y décèle plutôt le mode visuel utilisé pour son fameux pavé de 400 pages 365 Samouraïs et quelques bols de riz paru aux éditions Akileos en 2010. Entièrement réalisé à l’encre en noir et blanc et rehaussé de nuances de gris. Tout cela est agrémenté de quelques touches de rouge. Ce contraste fait sortir avec habileté tout le côté Helvétique !

Il va s’en dire que cet ouvrage ravira les fans de comics américains, de zombies et de légendes régionales. Par les temps qui courent, et dans cette bande dessinée ce n’est pas que le temps qui court, il y a tout ce que je recherche pour me distraire et passer un bon moment sans prise de tête. Ce genre de création nous démontre que l’on peut encore rire de tout, même d’un mythe fortement ancré dans le patrimoine d’une nation. Mais oui, quoi que les autres puissent s’imaginer, nous ne sommes pas si coincés…

Chronique de Nathalie Bétrix

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