Jamie Delano présente Hellblazer volume 2 aux éditions Urban Comics, à mon tour de faire de même :
John Constantine, espèce d’enfoiré, immonde salopard. Sale fils de femme de joie, mage escroc natif de Liverpool. Tu te défonces à l’adrénaline et à la magie la plus sombre. Sorcier à col bleu qui vient de la rue, tu as débarqué en sortant de nulle part des pages de The Saga Of Swamp Thing 37. Tu nous as expliqué que tu as toujours été présent, tapi dans l’ombre de l’univers glauque des mystiques pratiquants. Toi l’homme au synchronisme infernal et au sang démoniaque, tu vis des aventures à la fois trépidantes et dangereuses. Tu n’es qu’un putain d’égoïste, tu ne te bouges le cul que lorsque tu te retrouves dos au mur. Tu préfères traîner dans les pubs à boire des pintes en évitant la compagnie de tes congénères. Tu trimballes ta nonchalance dans ton trench-coat couleur olive tâché du sang et des magouilles dans lesquels tu trempes depuis ton plus jeune âge. Les gens sensés t’évitent comme la peste. Quand tu te retrouves dans la merde la plus totale, tu demandes l’aide de proches et d’amis. Mais on ne va pas se leurrer, tu les entraînes dans une spirale destructrice et la seule chose qui les attend au tournant, c’est la mort et une damnation éternelle aux portes des Enfers. La maigre consolation, c’est que leurs fantômes viennent te hanter pour te remémorer tes mauvaises actions. Tu ne choisis pas de camp, tu combats aussi bien les illuminés du Tout-Puissant venus d’en haut que les charognes baignant dans le souffre venant d’en bas. Tu es irresponsable et prétentieux, tu parles à Dieu et à Satan comme s’ ils étaient de vieux potes. Continuellement à leur demander si le fils prodigue change encore la flotte en vinasse ou si les damnés trouvent toujours autant de plaisir dans la sodomie perpétuelle en terre de désolation. Force est de constater que tu t’en tires avec les honneurs en conservant la vie sauve, mais rien ne t’empêche à l’occasion de détrousser des pauvres bougres de quelques billets ou de reliques de valeur pour ton bien personnel et surtout financier. Pourriture…
Jamie Delano, en bon fils de la perfide Albion, t’écrit des récits sur mesure à la hauteur de ton talent. Tes histoires baignent dans le surnaturel, le polar et la magie que tu pratiques en toute insouciance. Après avoir affronté la secte des fous de Dieu dans le premier volume de tes mésaventures, tu décides de faire profil bas.
Nous allons d’abord faire la connaissance de l’un de tes ancêtres à l’époque du Roi Arthur, qui est aussi maudit que tu ne l’es déjà. Ensuite tu partiras sur le sol américain, et tu te lanceras dans un combat teinté d’ébats amoureux contre une pauvre femme venue d’Afrique qui représente toute la misère du monde. Pour finir, tu iras te réfugier dans une communauté de beatniks pour vivre le peace and love mais cela ne durera pas. Ta guigne légendaire va s’abattre sur tes nouveaux compagnons. L’état royaliste n’apprécie guère les gens vivant hors du système. Les descentes, passages à tabac et rapts deviennent monnaie courante. Mercury, une jeune fille médium et puissante est enlevée sous tes yeux sans que tu ne lèves le petit doigt pour lui venir en aide. Tu comprends rapidement qu’elle a été kidnappée dans un but bien précis, servir les projets de l’armée britannique. L’occasion est trop belle pour toi, tu vas pouvoir faire un joli majeur suivi d’un superbe bras d’honneur à cet establishment conservateur. Et tu vas reprendre tes vieilles habitudes sous prétexte qu’une once d’humanité te pousse à vouloir sauver cette fille du côté de Stonehenge. Tous les grands sites préhistoriques sont reliés par des routes énergétiques appelées lignes de Ley. Avec l’aide de personnes aux pouvoirs psychiques, elles serviront à créer une arme provoquant la peur la plus effroyable chez les ennemis de la Grande-Bretagne. John pour toi, la physique quantique et la sorcellerie ne sont que des sœurs siamoises baignant dans la magie. Imper enfilé, la Silk Cut au bec et te voilà parti pour un beau bordel mystique. En cours de route nous ferons la connaissance d’un bon ami à toi, fort sympathique mais en cheville avec un tueur en série dont les cibles favorites sont des familles comme il y en a tant à chaque coin de rue. Tu es heureux de naviguer de nouveau dans le milieu occulte pourri londonien. En espérant seulement que cette chère Mercury ne finisse pas comme cette pauvre Astra, sacrifiée sur l’autel de ton arrogance démesurée qui s’accompagne souvent de maladresses et autres choix douteux.
La principale qualité de la série Hellblazer, il faut bien le reconnaître, est de toujours avoir été captivante et passionnante à lire. Tous les scénaristes, majoritairement britanniques, ont laissé une empreinte et un traitement adulte pour le plus ancien titre du label Vertigo. Ligne dirigée par la plus grande des éditrices, la bien nommée Karen Berger. Des récits intelligents où chaque auteur a eu une très grande liberté créatrice pour un contenu mature abordé de différentes façons. Anti-héros crée par le chaos magician Alan Moore, qui dut malheureusement abandonner sa création suite à une brouille avec DC Comics. Jamie Delano fut le premier à conter les épisodes du personnage teinté de surnaturel qui bascule rapidement dans l’horreur urbaine. Ce comic-book incorpore à sa trame fantastique des sujets tabous pour l’époque comme l’homosexualité, la vie en société anglaise. Et surtout une critique enragée de l’état et sa royauté, sous le règne de Margaret Tatcher, la Dame de fer. Cet auteur a eu beaucoup de « matière » et il ne s’en est pas privé pour fournir des scénarii goûtus, renforcés par de fortes prises de positions politiques.
Le seul petit bémol concerne la période des premiers épisodes et les artistes ayant travaillé sur la série. Richard P. Rayner, Mike Hoffman, Mark Buckingham, Ron Tiner, Alfredo P. Alcala, Lovern Kindziersky et Thomas J. Ziuko (pour ce tome). C’est efficace mais pas non plus exceptionnel, il arrive que la partie graphique manque « d’éclat ». Parfois le dessin pêche un peu et a du mal à se hisser au niveau qualitatif des scripts intelligemment rédigés par ces maîtres de la plume. Ni transcendants ou mauvais, les gaufriers restent sobres. Ils sont linéaires mais glauques à souhait et plaisants à lire. Des illustrateurs qui savent tout de même instaurer cette atmosphère si particulière. Les maîtres Bryan Talbot et David Lloyd apportent leur contribution pour relever la mise en page du livre et prouver que Hellblazer reste une BD bien écrite et dessinée.
C’est toujours un plaisir de se procurer ces gros pavés aux éditions Urban Comics. Qui je l’espère continueront jusqu’à la traduction des épisodes de Peter Milligan, c’est bien parti pour.
En conclusion, John Constantine gros enc…. Malgré toutes ces énormités que j’ai pu dire sur toi, tu restes mon perso de comics préféré depuis que ta route a croisé la mienne il y a dix-huit ans de cela. Cette chronique ainsi que tout le reste ne sont que le prétexte pour te dire que j’te kiffe mec.
Chronique de Vincent Lapalus.