LA ROUSSEUR… pointée du doigt

En tant que rousse, je ne pouvais sincèrement pas passer à côté de cette ardente petite bande dessinée. Charlotte Mevel nous raconte de manière sobre, mais claire tout ce qu’elle a vécu, comme beaucoup de gens, à cause de sa chevelure couleur feu ! La rousseur…pointée du doigt, publiée par les éditions Delcourt vous permettra de comprendre que toutes les idées véhiculées depuis la nuit des temps ne sont que pure invention et la plupart du temps la conséquence d’une « aveuglante » méprise.

Mon grand-père était roux, ma grand-mère avait les cheveux noirs de jais. Leurs deux filles sont nées l’une brune et l’autre noiraude comme sa mère. Ma sœur a vu le jour avec une chevelure épaisse et foncée. Quelques années plus tard, je pointe le bout de mon nez… un crâne bien lisse et absent d’une quelconque crinière. Les mois passent, ma tête finit par se couvrir d’un fin duvet, mais celui-ci ne fut pas encore d’un roux éclatant. Ce n’est que plus tard que l’on y décèle une discrète nuance caramel. Il faut attendre mes dix ans pour que le ton prenne l’ascendance vers une rousseur plus soutenue. On peut donc dire que j’ai été épargnée un certain temps des attaques de mes congénères, mais comme vous pouvez l’imaginer, cela n’a pas duré…

L’autrice, avec cet ouvrage, nous fait partager les différentes émotions qui l’ont accompagnée durant une bonne partie de sa vie. Elle évoque dans ce récit sa prime jeunesse en passant par la période épineuse de l’adolescence, l’âge adulte et la naissance de ses deux enfants. Les chapitres personnels sont associés à des anecdotes et autres faits divers qui illustrent à travers les siècles les hostilités malveillantes que vécurent les individus à la tignasse flamboyante. De l’ancienne Égypte au début du christianisme, le Moyen Âge et sa chasse aux sorcières, l’inquisition et j’en passe… Des allégories scientifiques nous éclairent sur les génomes qui déterminent la couleur des cheveux de notre descendance. Elle met également en avant des personnalités qui ont su faire de cette différence capillaire leur carte de visite. L’opus est relevé d’une illustration instinctive, où se décline une panoplie de teintes orangées : Cuivre, citrouille, corail, safran ou saumon. Tout cela souligné de jolis gris, de mauves et parfois de teintes plus vives. L’ensemble constitue une alliance survitaminée !

Pour elle, ce ne fut pas toujours aisé d’assumer les flammes qui surplombent sa tête. Elle nous dévoile ses expériences avec humour, de l’agacement parfois et un soupçon de stupéfaction. La naissance de son premier fils et les cadeaux incongrus qu’ils ont reçus : des poules rousses, une girouette, un paon, parce qu’il fait la « roue » ( !?) et autres articles de couleur orange : peluches de renard, film de Rox et Rouky… Le plus drôle ; c’est quand même la botte de carottes ! Ouf, j’ai échappé à tout ça, mes enfants tiennent de leur papa. Elle met également en avant les jolis mots d’oiseaux que les gens bien intentionnés nous lancent au visage :  Poil de carotte, sale rouquin(e), tu pues ou ça pue, pot de lait » etc… Si elle a voulu, à un moment changer la couleur de cette masse gênante, cela n’a de loin pas été une réussite. Pour ma part, ce fut plutôt le contraire. Ma rousseur étant plutôt légère, j’ai opté pour des colorations plus prononcées. J’ai rêvé d’être « Zora la Rousse », grande aventurière et jeune fille de caractère. Ado, j’ai changé mon prénom pour celui d’Abigail, sorcière de Salem et en 2012 j’ai imaginé me réveiller un jour avec la toison ardente et volumineuse de l’héroïne du film des studios Pixar « Rebelle ». Toute mon enfance j’ai été ennuyée par les rayons du soleil, j’ai fini par faire dans les périodes chaudes et lumineuses un concours de blancheur. Bon, comme beaucoup d’entre nous, ma peau fut quand même parsemée de petites tâches qui trouvaient place un peu partout sur mon corps, mais de préférence sur ma figure et le bout de mon nez. Cela n’est jamais passé ! Il ne sert donc à rien d’aller me chercher au bord de la plage, je n’y serai pas.

C’est indéniablement un album vivifiant qui m’a mis du baume au cœur. Même si je me doutais bien ne pas être la seule à avoir souffert de cette méchanceté gratuite, prendre possession du livre de Charlotte Mevel a renforcé la fierté que j’ai de faire partie de cette minorité de chanceux à être affublé de ce trésor que je n’échangerai pas pour tout l’or du monde. Vive les rouquins et les rouquines !

Chronique de Nathalie Bétrix

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