Si vous ressentez le besoin de contempler un matin un paysage qui imprègnera votre esprit d’une profonde beauté et qu’à votre réveil le ciel est couvert, plongez-vous dans la nouvelle bande dessinée de Didier Tronchet et Christian Durieux Le jour avant le bonheur confectionné avec soin par les éditions Futuropolis.
Quelle belle période que celle de l’enfance. L’insouciance, les copains et ses voisins. Erri habite tout seul dans un immeuble à Naples. Orphelin, il a été abandonné par sa mère adoptive, depuis il réside dans un tout petit cagibi. Dans l’agglomération, le soleil peine à trouver son chemin. Malgré tout, chaque jour, il trouve le moyen de se faufiler et d’éclairer les murs, les balcons et les fenêtres de sa lumière. Erri connaît la majorité des résidents qui se distinguent tous par leur originalité. L’habitante qui l’intrigue le plus est la jeune fille qui vit au troisième. Plantée devant sa fenêtre, le regard perdu dans le vide, elle ne bouge pas et ne sort pas.
Gaetano, le concierge du bâtiment, s’est pris d’affection pour le « bambino ». Ils partagent leurs repas et il lui apprend la scopa, un jeu de cartes napolitain. Il a toujours un œil bienveillant sur le garçonnet. Lorsque le bonhomme découvre une petite chambre cachée dans les sous-sols de la bâtisse, il le laisse s’y installer. Bien sûr, Gaetano va se rendre compte de l’intérêt que son protégé porte à la demoiselle et va le mettre en garde. Comme s’il pouvait prédire l’avenir, il sait qu’un jour cette histoire se terminera mal. Dix ans plus tard, que reste-t-il de ce présage ?
Ce qui m’a attirée en premier dans ce titre, c’est sa couverture. Ce mariage d’une douce nuance de mauve et d’un jaune ambré. Christian Durieux y a apposé une multitude de papillons qui enveloppent notre héros qui a le regard dans le vague. Je ne pense pas que le choix de l’illustration ait voulu nous précipiter dans les films de Federico Fellini, pourtant, à sa vue, je retrouve l’ambiance des comédies dramatiques du réalisateur. L’album est en grande partie recouvert de ces teintes clair-obscur, d’où parfois jaillissent une palette d’autres couleurs.
Didier Tronchet, après nous avoir longtemps fait rigoler avec les déboires de ses deux personnages pittoresques, Raymond Calbuth et Jean-Claude Tergal, s’est tourné vers des scénarios plus intimistes pour notre plus grand plaisir (bien que moi j’adore ses « joyeux boute-en-train »). Christian Durieux a un trait velouté. Ses dessins prennent forme sur les pages, tracés de lignes souples et ondoyantes. Il s’entoure de scénaristes illustres : Jean-Pierre Gibrat, Christian Perrissin ou encore Denis Lapière. Il a su sublimer chacune de ces œuvres grâce à l’éventail de ses pigments et la finesse de ses compositions.
Ce binôme, m’a enchantée avec La vie me fait peur et Le jour avant le bonheur. Je le dis haut et fort et de tout mon cœur, ce serait un honneur pour moi qu’ils se retrouvent encore une fois pour m’éblouir de leur grandeur !
Chronique de Nathalie Bétrix

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