Méditerranée, histoire d’un continent kaléidoscope 

Un gars avec des allures de copain qui fait tranquillement la planche au milieu d’une mer de p’tits carrés bleus…omniprésent le bleu… plutôt bien choisi pour la couverture d’une bande dessinée intitulée Méditerranée, histoire d’un continent kaléidoscope… m’a donné envie d’aller y faire moi aussi quelques brasses…

Tout nouvellement récompensé par le prix de la Bande Dessinée géographique 2025, Aurel signe ici un album dense et extrêmement intéressant édité chez Futuropolis ; riche de 224 planches, en couverture cartonnée, il s’agit à la fois d’un bel ensemble informatif d’histoire, géographie et géopolitique, d’approches culturelles variées et de souvenirs personnels de l’auteur, savamment distillés sur les thèmes de l’unité et de la diversité du monde méditerranéen. Un questionnement sous-tend l’ouvrage : qu’est-ce que signifie être méditerranéen ? C’est finalement plus de ses rivages et de ceux qui y vivent qu’à la mer elle-même dont il est question.

Scénariste, dessinateur et coloriste, Aurel conduit une double narration.

Un premier fil reprend les différentes rencontres de l’auteur autour de cette interrogation. Auprès de spécialistes, chercheurs et universitaires en histoire, en archéologie, en linguistique… il puise des savoirs à valeur scientifique retranscrits dans l’album en cartes géographiques, paragraphes explicatifs et planches de bande dessinée savoureuses sur l’histoire de l’occupation de l’espace méditerranéen. Il se paie même le luxe de « discuter » avec l’esprit de Fernand Braudel (référence sur le sujet !) quelque part au Père-Lachaise. Auprès de férus de gastronomie, d’artistes et même de sa mamie, c’est une approche plus sensible, faite de souvenirs d’enfance et d’anecdotes plus personnelles qu’il construit et offre au lecteur. (Je ne verrai plus jamais un zeste d’orange de la même façon !)

Un second fil retrace le périple fictif et très réaliste d’Omar, de la corne de l’Afrique en guerre à la jungle de Calais… itinéraire de migrant, parcours du combattant pour trouver refuge auprès d’un frère déjà exilé en Grande Bretagne… Une phrase de cet album ne me quittera plus « La Méditerranée, certains s’y baignent, d’autres s’y noient. »… Les planches dédiées à Omar sont parfois dénuées de bulles, de textes… ils ne sont alors pas utiles ; les dessins, décors plutôt succincts et regards prenants, sont très éloquents ; et puis lorsque les mots s’invitent, ils prennent aux tripes…

Zone de transit, carrefour culturel ou encore enjeu géopolitique, la Méditerranée est présentée comme un espace pluriel, mouvant au gré de l’Histoire et des flux de populations. C’est un album plein d’humanité qui ne laisse pas indifférent, en plus de susciter des réflexions sur le monde actuel. Une lecture instructive et sensible, fortement conseillée !

Chronique de Louna Angèle.


© Futuropolis, 2025.

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