ENGINEER À la conquête du rail T1

Ce manga, édité par les éditions Kotodama (terme se traduisant par « l’âme des mots » ou paroles sacrées), se propose de retracer l’histoire du chemin de fer japonais (en deux tomes), histoire qui débute en 1870, avec l’arrivée au pouvoir du 122ème empereur Meiji qui souhaitait promouvoir une ouverture sur l’extérieur du pays.

Le récit débute en 1900 (l’an 33 de l’ère Meiji, 1868-1912). La concurrence est rude entre les sociétés privées et la ligne de chemin de fer nationale pour grignoter des parts de marché et contrôler le rail. Mais cette rivalité permettra des progrès technologiques majeurs. Ce sont ces événements que Kunihido Ikeda, mangaka et rédacteur spécialisé dans le chemin de fer, nous propose de suivre avec Engineer.

YasuJiro Shima, ingénieur, chef de service des chemins du Kansai, cherche à augmenter la vitesse des locomotives, dont le dernier modèle, la Hayakaze. Son seul défaut est un démarrage trop brutal, qui ne permet pas de gagner du temps sur les autres compagnies. L’ingénieur cherche des solutions, lorsqu’il fait la connaissance du conducteur de train Tetsundo Amamlya. Ce dernier est capable de démarrer la locomotive en douceur. Après quelques mésaventures, les deux se lient d’amitié et le chauffeur lui confiera enfin son « secret ».

Nous suivrons leurs pérégrinations à travers le pays du soleil levant pour améliorer la vitesse, le confort et les techniques. Les intrigues se développent sur deux chapitres, toujours basées sur des faits réels. Chaque chapitre se clôt par deux trois pages pédagogiques bienvenues. Ainsi, nous découvrons le passage des locomotives à charbon aux locomotives électriques et les conséquences sur les anciens et jeunes conducteurs de locomotive. Des professionnels qui pouvaient se sentir déshonorés s’ils étaient responsables d’un retard sur l’horaire prévu. Le récit met merveilleusement en relief la mentalité des Japonais de cette époque et leur difficulté à accueillir la nouveauté. La superstition est largement présente mais se trouve contredite par les avancées scientifiques.

Dans les deux derniers paragraphes, nous nous retrouvons en plein western : des « bandits », chevauchant leurs chevaux, attaquent les convois ferroviaires pour voler l’argent. Ces derniers s’estiment lésés par rapport à la présence des lignes de chemins de fer sur leur territoire. Le côté Far West est renforcé par le fait que les structures comme les ponts et les locomotives étaient tous d’origine américaine. L’aventure n’est donc pas absente de ce premier tome.

Le dessin est semi-réaliste, voire caricatural, concernant les personnages. Mais, le trait de l’artiste est précis lorsqu’il s’agit de représenter les trains et les paysages. Kunihido Ikeda excelle pour donner des explications techniques claires, précises et accessibles, ce qui ne nuit en rien la fluidité du récit.

La lecture de cet opus permet d’appréhender agréablement un pan de l’histoire du Japon et l’état d’esprit de ses habitants. Il n’est pas utile d’apprécier ou d’avoir des connaissances particulières sur les trains pour savourer ce manga. Je dois souligner l’attention portée aux finitions, ce qui en fait un bel objet. La présence d’un cahier documentaire imprimé sur papier glacé et en couleur est un atout non négligeable.

Chronique de Marc Lécrivain.



©Éditions Kotodama, 2025.

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