Mike Mignola en compagnie de Brian Augustyn avait lancé le premier Elseworlds avec Batman Gotham by Gaslight, une version du Chevalier Noir traquant Jack l’Éventreur au XIXe siècle. Andy Diggle, Leandro Fernández, Dave Stewart et Matt Hollingsworth reprennent le flambeau avec brio. Batman – Gotham by Gaslight 1893 T1 aux éditions Urban Comics s’insère dans la continuité de ce monde alternatif en l’étendant au-delà de la chauve-souris.
1860, un météore s’écrase sur les plaines du Midwest américain.
1893, les rues de Gotham City s’embrasent à la suite du vol de l’artefact de Jong Li par Catwoman lors d’une exposition. Le commanditaire de Selina Kyle est la terrifiante Ligue des Ombres. Le Chevalier Noir passe à l’offensive contre l’organisation d’assassins, reste à savoir qui deviendra le détenteur du joyau.
En Antarctique, le professeur Adam Strange est mandaté par Bruce Wayne en vue de fouilles archéologiques. Le spécialiste trouve les vestiges enfouis d’une civilisation perdue où séjourne la dernière représentante d’une culture oubliée.
En Écosse, la Reine Victoria envoie son conseiller spirituel personnel, John Constantine, enquêter sur l’éveil de reliques appartenant aux butins secrets de l’Empire.
Au Colorado, Allan Scott est l’unique survivant d’un accident de chemin de fer. Il a été protégé par un anneau vert magique.
Au Kansas, Lex Luthor rachète des concessions sans valeur. Il tirerait de ces filons un matériau rare capable de booster l’innovation technologique. La journaliste Lois Lane du Daily Planet flaire un plan machiavélique échafaudé par le philanthrope.
À Smallville, le shérif fait régner l’ordre sans tirer un seul coup de feu et désarme les meilleurs gâchettes de la région de son regard ardent.
Cette chaîne d’événements étranges préside l’arrivée d’une calamité appelée le fléau des fils de Krypton, l’ère de la vapeur et de la mécanisation risque de connaître une nouvelle évolution.
En digne fils de la Perfide Albion, le trop rare Andy Diggle développe un univers laissé en jachère depuis bientôt quarante ans. Il bombarde son intrigue principale de subplots donnant au récit un rythme effréné. L’aventure et l’action croisent le fer face au suspense avec une efficacité redoutable. Ce pur produit de l’école anglaise aborde le genre super-héroïque en apportant une touche narquoise et une pointe d’humour british à l’instar d’Alan Moore du temps de La Ligue des gentlemen extraordinaires. Le scénariste jongle entre steampunk, science-fiction, fantastique en plein cœur de la révolution industrielle et de l’époque victorienne. Diggle est un feuilletoniste de talent. Il réinvente, anime un pan complet de l’univers DC Comics avec une aisance brillante à l’aide d’une narration impeccable et de dialogues cousus main.
L’argentin Leandro Fernández maintient une mise en page racée voire musclée. Le dessin se déploie grâce à un coup de crayon énergique aux lignes et contours assurés. L’artiste démontre sa maîtrise percutante du trait en noir et blanc, il donne aux personnages une identité visuelle et gestuelle du plus bel effet. La combinaison d’architecture minutieuse ainsi que des cadres soignés fusionnent avec saveur, Fernández favorise un séquençage éthéré. L’encrage s’applique par de grands aplats sombres, sa stylisation et les masses sont superbement travaillées. Dave Stewart et Matt Holingsworth emploient une colorisation chiadée qui épouse à merveille les différentes atmosphères. Les tons alternent entre demi-teinte ocre et luminosité chamarrée, les deux coloristes couvrent un large spectre de nuances.
Le rétrofuturiste Batman – Gotham by Gaslight 1893 T1 aux éditions Urban Comics ajoute une pierre angulaire supplémentaire à l’édifice du multivers. Kingdom Come, Superman : Red Son, DCeased, Dark Knights of Steel, ou Bat-Man : First Knight me viennent à l’esprit. La collection s’agrandit, le lecteur y trouvera obligatoirement son bonheur.
Chronique de Vincent Lapalus.


© Urban Comics, 2025.