Pas forcément toujours facile d’amener les plus jeunes à la littérature classique… a fortiori à la poésie classique américaine du XIXème siècle !! C’est pourtant l’objectif que s’est fixé Lydia Corry avec Le jardin d’Emily, une histoire sur la jeunesse d’Emily Dickinson (« Wildflower Emily » dans sa version originale anglophone) paru chez Jungle.
Le parti pris est clairement explicité par l’autrice dans une « lettre aux lecteurs » en début d’ouvrage : le récit, bien que biographique et sérieux, est parcellaire et orienté sur l’amour de la nature, notamment celui des fleurs, qui fut l’un des thèmes de prédilection de la poétesse.
Ouvrage destiné à la jeunesse, « Le jardin d’Emily » est une parenthèse douce aux dessins naïfs et tendres où l’on suit Emily-fleur sauvage du Manoir parental d’Amherst, dans le Massachusetts, aux plaines et forêts environnantes. Après quelques pages introductives pour illustrer l’attrait d’Emily pour la botanique, l’autrice nous entraine dans une journée imaginaire de pérégrinations à la recherche de spécimens floraux pour enrichir son herbier. Au côté de Carlo, son chien fidèle et protecteur, c’est toute la nature qu’emmagasine la demoiselle en sa mémoire poétique : coucher de soleil et bruissement du vent, bourdonnement des insectes et fraicheur des bosquets…
La particularité de l’album réside dans l’utilisation constante des poèmes et extraits de correspondance pour emplir les phylactères et les transitions entre les planches. Alternance de saynètes familiales et de pleines pages champêtres illustrant un extrait poétique, cet album est une ode aux promenades bucoliques. Aquarelle, peinture, encre et pastel. La palette utilisée est en parfaite adéquation : des tons pastel en camaïeux, des couleurs analogues déclinées judicieusement et des touches de couleurs douces variées pour faire ressortir de petits éléments comme les insectes (qui ne sont pas sans rappeler les « drôles de petites bêtes » d’Antoon Krings, avec leurs chapeaux haut de forme et leurs vestes queue de pie) ou les fleurs, munies des étiquettes portant leur nom commun et latin… La botaniste émérite n’est jamais loin de l’écrivaine.
À la suite du récit, l’autrice a ajouté des pages informatives sur la poétesse sous forme de brèves anecdotes illustrées et décorées de scans de fleurs séchées et de dessins simples, comme croqués sur un coin de table, au pastel marron… De quoi éveiller encore davantage l’intérêt !
Charmée par un parfum d’innocence et de rêverie, je me suis promenée au fil des illustrations de Lydia Corry et des mots d’Emily Dickinson avec un plaisir certain… Objectif atteint pour moi, puisque bien que je ne sois plus une enfant depuis longtemps (quoique… ), j’ai prolongé ma lecture par quelques recherches sur le sujet… Si vous avez, vous aussi, l’occasion de parcourir ce bel album, n’hésitez pas à ajouter une once de poésie à votre journée !
Chronique de Louna Angèle.


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