Après avoir réalisé ensemble un mickey avec HORRIFIKLAND pour Glénat, le tandem Lewis Trondheim et Alexis Nesme s’attaque pour Dupuis à un nouveau personnage emblématique de la Bande dessinée : le marsupilami.
Avec EL DIABLO, ils revisitent l’un des personnages phares de Franquin créé il y a plus de 70 ans avec pas mal de détachement, d’ingéniosité et d’humour. Ils ambitionnaient de s’éloigner de l’idée originelle de son créateur, de sa représentation classique, de son dessin maîtrisé et ultra-précis ce que les bédéistes font ici avec pas mal de réussite en le plongeant dans le passé, dans une époque marquée par un souffle épique incroyable.
On reconnaît immédiatement la pâte de Trondheim et son humour tantôt féroce, parfois acide toujours lucide, il nous embarque avec facilité dans son univers. Il a choisi pour cet album une incursion en terre sauvage à la découverte de l’arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière -arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière grand-père du marsupial lorsque les conquistadors embarquaient à bord de leurs caravelles avides de terres et d’or.
On est charmés par les nombreux acteurs aux caractéristiques poussées à l’extrême et par un jeune héros souvent imprévisible que l’on prend beaucoup de plaisir à suivre dans ses trépidantes p. On est un peu désarçonnés par un animal sauvage finalement beaucoup moins terrifiant que prévu mais irrésistiblement attachant.
L’histoire est sympathique mais c’est la prestation du dessinateur qui mettra tout le monde d’accord. Son scénariste sait qu’il adore représenter la nature. Il lui a composé un épisode sur mesure, l’invitant à composer de nombreux décors, un environnement à la fois dense et somptueux. Dans cette aventure, il représente avec talent la jungle, la montagne et la mer et c’est assez fabuleux.
Avec ses décors foisonnants, ses protagonistes caricaturaux et ses couleurs directes, il nous embarque dans une aventure qu’il maîtrise de bout en bout, une démonstration visuelle aux crayons, à la gouache et un spectacle à la fois époustouflant, loufoque et exaltant. Avec la couleur et des jeux de lumière subtils, il anime ses personnages avec malice.
Avec EL DIABLO, les auteurs ont réussi un joli challenge en signant une BD divertissante, réaliste, familiale, récréative et particulièrement sublime.
Chronique de Stéphane Berducat.


© Dupuis, 2024.