CONTES FABULEUX DE LA NUIT

Quoi de mieux qu’un recueil de contes lorsque l’on n’arrive pas à dormir ? En format manga (on commence par la fin), une mamie nous raconte les contes fabuleux de la nuit. Par cette belle mise en abîme, l’autrice japonaise Miyako Miiya fait preuve d’originalité, tout en puisant dans l’imaginaire collectif. Chaque histoire – il y en a 14 – fait quelques feuilles, et s’accompagne d’une page d’épilogue, drôle, éclairante ou émouvante. Les éditions Rue de Sèvres et Le renard Doré nous proposent une BD noir et blanc accessible, joliment construite, dotée d’une très belle couverture, aux dessins colorés de personnages juvéniles contrastant avec le titre en encart noir. Ils nous apportent surprises, humanité, divertissement et réconfort. De quoi chasser les idées noires, insomnies et bruit de tempêtes pour mieux s’approcher du pays des rêves ! En bonus, visitez le portfolio en ligne de l’autrice, pour une version couleur de ses personnages, si choux, à tomber. (miyakomiiya.wixsite.com).

Le fantastique se mêle à l’absurde, avec beaucoup de tendresse. Un angelot est recueilli par une famille canard. À moins que que ce ne soit lui qui prenne soin d’eux. Un démon femme-renard, attend 60 ans que son compagnon grossisse, finira-t-elle par le manger ? La gorgone et un jeune peintre discutent à l’heure du thé. Les personnages, étiquetés comme imparfaits, nous invitent à voir plus loin que les apparences. La sorcière calamiteuse a en fait une magnifique voix, mais aussi des pouvoirs insoupçonnés. Le garçon aux grandes oreilles qui ressemble à un elfe s’avère un très bon conseiller, si tant est que l’on prenne le temps de l’écouter et de le connaître. La juxtaposition de récits est source d’un renouveau, d’une richesse émotionnelle. Il y a là beaucoup de mystères, des sujets sérieux (agressions, faim, abandon, séparation…), des histoires plus légères et fantastiques (les audacieux petits livreurs), des anecdotes du quotidien, des fins heureuses, sans oublier de petites phrases malicieuses, bien tournées, qui viennent nous divertir. Un délice !

Chaque séquence démarre par une belle page noire, étoilée, mettant en valeur le titre à la typographie soignée. Les personnages sont souvent très mignons avec leurs joues joufflues, attachants par leur bonté, mais aussi fascinants, de la créature flamboyante aux serpents pointant leur tête d’un grand chapeau. L’île qui vole dans le ciel est un joli clin d’œil au « château dans le ciel » de Miyasaki. Le découpage s’adapte pour donner toute leur place à certains personnages grandis, qu’ils soient puissants ou au contraire fragiles, telle le superbe nid de petits canards et leur mère entrelacés à l’ange. Les métamorphoses sont spectaculaires, jusqu’à l’apparition d’un dragon, et un liseron explose carrément le cadre – et la maison de la fillette qui l’a fait poussé. Les duos ont des airs de « la belle et la bête », avec l’exotisme de la culture japonaise en plus : de quoi se changer les idées, être charmé, dépaysé! Et laisser l’esprit vagabonder, nourri de belles images et de scénarios irréels.

Les contes, en nous donnant à voir les différentes facettes de l’humain et à l’aide de belles et riches métaphores et des créatures les plus incroyables, nourrissent notre inconscient et nous aident à grandir. Intemporels et magiques, ils ont toute leur place dans le 9ème art. On en redemande !

Chronique de Mélanie Huguet-Friedel.

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©Rue de Sèvres / Le Renard Doré, 2024.

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