BARBARIC

Amateurs de verbe et de poésie, j’aimerais vous présenter le cousin éloigné de Conan. Barbaric de Michael Moreci, Nathan Gooden et Addison Duke aux éditions Urban Comics narre les tribulations débridées d’un primitif féroce à l’intelligence limitée. Rantanplan, sors de ce corps !

Owen est un véritable broyeur à bidoche. C’est un barbare, issu d’une interminable lignée de barbares venue des terres barbares de Gimesh. Son existence se résume à boire, baiser et tuer mais pas forcément dans cet ordre. En bref, c’est un guerrier nordique dans l’âme.

La confrontation avec une trinité de sorcières va pourtant changer la donne. Elles le maudissent, peu d’opportunités s’offrent à lui. La première serait un aller simple pour l’Enfer éternel tandis que la seconde consisterait à occire des malandrins afin d’œuvrer pour le bien.

Il n’y a pas à tortiller du cul pour chier droit, la décision s’impose d’elle-même.

Dès lors, Owen traîne dans les tavernes pour répandre (contre son gré) la justice. Le maléfice l’a rendu timbré, il faut avouer qu’il n’est plus tout seul dans sa tête et qu’il a une fâcheuse tendance à papoter avec sa hache.

Soren, une gentille nécromancienne, vient à sa rencontre en lui réclamant de l’aide. À quelques lieux dans une abbaye, des prêtres s’adonnent à des rites occultes et boivent du sang de vierge. Les choses simples de la vie en somme…

La mission ne l’enchante guère néanmoins Owen décidera de remplir son quota de bonnes actions. Et qui sait ? Le karma lui permettra peut-être de regagner sa liberté voire de retrouver sa condition de sauvageon.

Fini de jouer de la mandoline ou de conter fleurette. Il est temps pour notre baroudeur de faire tournoyer son arme, d’arracher des burnes et de démembrer du cureton à la chaîne. Sa lame diabolique réclame sa dîme d’hémoglobine.

Barbaricne révolutionne pas le genre toutefois il respecte les poncifs et se distingue par un récit mijoté au poil. Michael Moreci tire ses influences de Robert E. Howard, Edgar Rice Burroughs sans omettre Michael Moorcock. Il passe les pères fondateurs de la littérature fantaisiste au shaker en y ajoutant une pincée d’esprit sarcastique façon 2000AD pour d’obtenir un cocktail réussi d’aventure, de violence et d’humour noir. L’auteur dépeint un univers cool limite festif parcouru par un duo de pseudo-héros enragés. Les dialogues sont contemporains et outranciers comme pas permis, ce titre est possédé d’une fureur extrême auquel Moreci mélange une forte dose d’action, de magie ainsi que de surnaturel.

Nathan Gooden assisté d’Addison Duke élabore une mise en page à la cuisson saignante.Les artistes réalisent une partition graphique baroque que ne renierait nullement l’artiste R.M. Guéra, leur composition énergique tuméfie. La scénographie s’élève au rang de joyeux drille viking, ça crobarde avec jovialité. Le dessin est sale voire gras, les personnages sont typés. L’encrage est crasseux, la pénombre s’étale en masse grâce à un passage au noir conférant du relief et de l’épaisseur à un crayonné assuré. L’éclairage joue sur deux tableaux, Addison Duke tamise la couleur en mélangeant des tons ocre à des nuances flashy. Les pigmentations giclent sur les planches par hectolitre à travers une large gamme électrisante de rouge, rose, orange, vert et etc. Le visuel épouse le dynamisme, le grain de folie que requiert l’histoire et écorche le papier pareil à du verre pilé.

Ce premier volume édité par Urban Comics fissure le foie comme une bonne rasade d’hydromel hors d’âge, la suite sera traduite incessamment sous peu alors à très vite.

Chronique de Vincent Lapalus.


© Urban Comics, 2024.

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