MOU

J’ai longtemps vu une trompe d’éléphant entourant de toute sa tendresse la jolie rouquine de la couverture de la dernière publication de Benoît Feroumont. Finalement, que ne fut ma surprise et ma joie de découvrir que l’animal câlin qui enveloppe la belle de son doux tentacule n’est autre qu’un céphalopode. Tout le monde le sait, hein quoi non ? j’affectionne depuis longtemps les pieuvres et leurs multiples membres… Mou, édité par l’incontournable maison d’édition Dupuis, nous propose un récit loufoque, réalisé par un artiste à l’imagination débordante. Connu pour son extraordinaire série Le royaume, il est sorti des sentiers battus avec Gisèle & Béatrice, petit conte érotique, tout en gardant son graphisme doux et tout en rondeur. Le revoilà avec une nouvelle comédie coquine.

Charles est un jeune homme qui a un travail passionnant ! Il parcourt les rues de sa ville pour livrer des repas commandés en ligne. Sa mère désespère et le harcèle au téléphone pour qu’il trouve un boulot plus approprié. Timide et réservé, sa vie n’est pas des plus palpitante. Arrivé en retard à une livraison, totalement trempé et avec une pizza froide, il se fait rembarrer par son client. Dépité, il se demande s’il ne devrait pas changer de job. Sur la devanture d’un troquet, il remarque une annonce « cherche personnel de salle », et pourquoi pas ? Manque de bol, la patronne lui réplique « ici, elle n’emploie que des femmes ». Le voyant complètement dépité, elle lui offre un verre. Installé à une table, il ne voit pas entrer Paola. Cette demoiselle à la chevelure flamboyante, le remarque au premier coup d’œil. Charmeuse, elle s’installe à ses côtés.

Elle aime sa naïveté, tandis que lui est émerveillé par son intelligence. Mademoiselle est chimiste. L’embobineuse espiègle, ne fait qu’une bouchée du petit gars et l’emmène dare-dare dans son appartement. Le bonhomme qui n’est pas accoutumé aux nuits de folies, « envoie » un peu rapidement…Si la miss aimerait bien remettre le couvert, Charles, confus, préfère dormir. A l’aube avant de déguerpir comme un misérable, il s’abreuve d’un liquide déniché dans le frigo. Le goût est dégueulasse. Forcément, il vient d’avaler une décoction de la donzelle. Quand on n’a pas de pot, on n’a pas de pot !

Lessivé et de retour dans sa piaule, il s’en retourne sous la couette. Il est réveillé par les hurlements de sa maman, il saute ( !?), glisse de son lit. Les paroles qui sortent de sa bouche n’ont aucun sens. Sa mère agacée par les nouvelles frasques de son fils, l’astreint à dégager. Poussé dans la cuvette des WC, le gaillard devenu poulpe, est évacué dans le conduit. L’histoire pourrait s’arrêter là, pourtant c’est ici que tout commence.

J’en entends qui vont dire « pauvre type, que va-t-il advenir de sa vie » et bien attendez-vous Messieurs, à une surprise de taille. Oui, il a changé de forme et oui, le voilà affublé de huit extensions qui peuvent sembler bien encombrantes. Si vous saviez. D’un célibataire mal dans sa peau et sans grande ambition, il est devenu le tombeur de ces dames. Comme il a une forme extensible, des appendices souples et adroits, l’effarouché est attendu, espéré et adulé par toutes les donzelles de la cité. Qu’elles soient solitaires, mariées, âgées ou jeunes, il les visite et leur donne les plaisirs désirés.

Malgré cette soudaine popularité, Charles aimerait retrouver une vie normale. Mais quand on a accédé à la gloire, est-il possible de redevenir un simple anonyme ? Et vous, mes lecteurs masculins que désireriez-vous ? Les avoir toutes dans votre lit ou n’en posséder qu’une ? Non, non, je ne veux pas le savoir. Je vous laisse à vos fantasmes et m’en vais refermer le couvercle de mes cabinets…  

Chronique de Nathalie Bétrix

© Dupuis, 2024.

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