Qui n’a pas envie de s’évader pour les vacances ? Et bien je vous propose une évasion à la fois au rayon jeunesse, et aux portes d’un autre monde ! Mélissa Morin nous offre, avec Les royaumes de Tiketone, un récit fantastique réussi, intriguant et haletant, qui peut séduire aussi les adultes! Le premier tome, les reliques des morts vivants, nous plonge au côté d’un groupe d’enfants qui fera penser avec délice aux enfants perdus de Peter Pan ou à ceux de Sa majesté des mouches. Et le jeune personnage principal, Thomas, portant toujours un casque sur la tête et semblant accomplir une quête, a quelque chose d’Harry Potter dans sa différence… Ce bel album, édité aux éditions Casterman, offre en prime de subtils tracés et une très belle colorisation. A découvrir sans hésiter, à partir de 9/10 ans.
Un garçon énigmatique est arrivé au foyer. Traumatisé par l’accident de voiture qui a coûté la vie à ses parents, il ne parle pas, mais émet des bruits étranges. La parole finit par revenir, et un groupe d’amis se crée autour du jeu de Tomas : trouver cinq reliques laissées par cinq gardiens : une coquille d’escargot, une plume de merle, et trois autres, plus difficiles à trouver. Il faut dire que sa sœur, juste avant de disparaître soudainement lors de la chute du véhicule, affirmait la présence de fantômes et d’une porte à franchir. La quête serait-elle plus sérieuse qu’elle n’en a l’air ? La recette scénaristique est très bonne : une pincée d’humour pour dédramatiser la situation, une bonne dose d’énigmes à résoudre, un groupe d’aventuriers qui ne manque pas d’esprit d’initiative et de répartie – façon Goonies, un mystère et une tension qui montent crescendo comme des blancs en neige.
Le dessin, réaliste, va à l’essentiel, dans l’esprit de la ligne claire. De fins contours bleus apportent de la douceur, tout comme les ombres en légères hachures. La colorisation est également subtile et délicate, du vert tendre de l’herbe aux couleurs de peaux, des arbres bleus lavande aux ciels et troncs rosés. Les yeux en amande des enfants leur donnent un côté malicieux. L’auteur donne la part belle aux onomatopées, qui semblent glisser dans le ciel, frôler les gens ou même les bousculer. Le fantastique s’immisce par une trame pointillée, éthérée, qui plaira au lecteur, tout comme les murmures à la typographie unique. Est-ce un rêve ou une magie inconnue qui crée ces formes graphiques de plus en plus présentes dans l’air et la pelouse ? Rosaces, spirales et flux musicaux habitent l’espace et nous intriguent. Gare, une tempête se lève !
J’adore cette histoire originale, pleine de vie, de résilience. Ces enfants « joyeux, innocents et sans cœur » comme les décrit si bien James Matthew Barrie. Thomas mène la danse en combattant ses démons intérieurs. Comme dans Peter Pan, la mort n’est jamais loin. Et la magie opère. Le tome 2, l’école de la nuit, devrait paraître à la rentrée 2024 ; il sera suivi d’un tome 3, les enfants sans visage. Plus qu’à patienter et laisser l’imagination faire le reste !
Chronique de Mélanie Huguet – Friedel

