Oradour L’innocence assassinée

Il y a 80 ans, le 10 juin 1944, un massacre de masse fut perpétré en France par des criminels SS. Le village d’Oradour-Sur-Glane , un paisible bourg de la Haute-Vienne a été cruellement anéanti, victime de la barbarie nazie quelques jours seulement après le débarquement des troupes alliés en Normandie.

Afin de se venger des nombreuses actions menées par la résistance, les soldats de la Waffen SS de la division Das Reich qui remontaient vers le front normand encerclèrent le village, rassemblèrent les habitants sur la place principale avant de commettre l’impensable, l’assassinat de 643 innocents.

Robert Hébras est l’un des rares rescapés de cette folie meurtrière et il n’aura de cesse tout au long de sa vie de lutter contre l’oubli, de s’engager pour la paix et de préserver coûte que coûte un patrimoine hélas menacé. C’est donc assez logiquement que le valeureux témoin de ces atrocités contribua à son niveau à la réalisation de cette Bande Dessinée intitulée Oradour L’innocence assassinée.

Publiée par Editions Anspach, elle est scénarisée par Jean François Miniac , un écrivain et auteur de bande dessinée qui avait été profondément marqué par la visite du village martyr quand il était jeune. Quand il a été contacté par OHVR (Oradour, Histoire, Vigilance et Réconciliation) l’ association porteuse du projet pour produire une bande dessinée et s’adresser aux jeunes générations, l’homme de lettres a rapidement accepté de relever le défi.

Après avoir écouté les témoignages de Robert Hébras et Camille Senon il s’est entouré de trois historiens qui ont apporté leur caution au fil de l’élaboration.

Il a mené des recherches poussées, imaginé des arcs narratifs clairs et crédibles et conçu un scénario avec le souci permanent d’être le plus proche possible de la réalité. Il établit un rapport chirurgical de la dramatique opération. On y perçoit la cruauté des soldats, la surprise de civils déconcertés et stupéfaits. L’horreur et l’émotion nous étranglent rapidement.

Bruno Marivain excelle pour mettre en cases des récits historiques. Il établit un découpage varié, immersif et intelligent dans lequel on admirera de nombreuses cases panoramiques et un rendu cinématographique saisissant. Pour ce projet, le dessinateur ne bénéficiait que d’une iconographie très limitée Il a cependant utilisé l’ensemble des moyens à sa disposition et notamment une modélisation amorcée il y a une dizaine d’années. Son dessin réaliste et détaillé, ses personnages aux traits singuliers affichent des expressions qui nous plongent dans une histoire poignante.

Mais ce sont les délicates couleurs de Cerise, riches en nuances et subtiles qui, achèvent de nous convaincre avec la composition d’ambiances puissantes et l’orchestration de pics de tension bouleversants.

Oradour L’innocence assassinée est un album abordable, authentique et glaçant pour « ne pas oublier ». Il démontre une fois encore que la bande dessinée est un medium incroyable pour transmettre et aider à mieux comprendre le monde qui nous entoure. Il est doté d’une préface judicieuse et d’un dossier conclusif intéressant signé par Dominique Danthieux et Philippe Grandcoing.

Chronique de Stéphane Berducat.


©Éditions Anspach, 2024.

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