Mortesève T1 : Hang & Orgue

Le thème d’une entité supérieure, créature gigantesque, et du fragile équilibre des planètes et de leurs écosystèmes est récurrent dans le monde du neuvième art. Il faut dire qu’il est drôlement efficace. Quentin Rigaud nous en fait une fois de plus la démonstration, avec un récit fantastique / Science-fiction haut en couleur, magnifique, hypnotique, et angoissant! Mortesève aux éditions Casterman BD, compte déjà 2 tomes, et s’inscrit sans rougir et avec beaucoup de modernité dans la veine de la série Aldebaran, ou du diptyque Negalyod (deux grands coups de cœur pour moi). Il était grand temps de vous parler du tome 1, dont le titre, Hang & Orgue fait référence à deux géants, fondamentaux dans l’ordre naturel en place. Quand ce qui paraissait une légère perturbation devient un événement destructeur, Avine, jeune souffleuse de verre survivante, a besoin de partir à l’aventure trouver des réponses à ses questions. Le récit, prévu en 4 tomes, pourra captiver un public ado/adulte, qui appréciera également de profiter du travail de l’auteur en direct. Il se filme en effet en live lors de son travail de création, sur twitch.

A première vue, point de Godzilla dans « Mortesève ». Hang, « l ‘instrument » de la fertilité, est vénéré et bienfaiteur. Tous les 10 ans, il entraîne germinations et floraisons sur son passage. Mais il n’est pas seul à dominer les cycles de vie de la planète. Alors qu’il dévie de sa route, ce qui n’est jamais arrivé en plusieurs décennies, l’immense être volant Orgue, invisible, sème soudain la mort de tout un village. Étrangement, Avine survit à la catastrophe. Est-ce dû à sa coupure récente, qui l’a mise en contact avec une sève surnaturelle, et lui a aussi donné une sorte de pouvoir magique, lui permettant de voir le fil tenu de chaque vie ? Ou à l’absence d’Hang ? Ou est-ce la faute de Kahl, frère d’Avine et gardien d’Hang ? La douleur du deuil est trop forte, le déni s’impose quand arrive un nouveau voyageur… Allié ou handicap ? Ne plus être seule… Avine se livre et nous l’accompagnons dans sa quête et ses mésaventures, qui ne manquent pas d’actions, entre survie, combats et escalade. Qui s’en prend à Hang, et dans quel but ? Avine va-t-elle retrouver son frère ? Les humains parviendront-ils à protéger le colosse sacré ?

La couverture aux tons chauds et relevés est à l’image de tout l’album, réalisé avec brio à la tablette graphique. La couleur est partout, et très harmonieuse, avec de belles associations. On se régale des nuances de vert, rose, orange, des couleurs de la terre, de la diversité des couleurs de peaux, de ce monde pleinement fantastique. Le traitement des ombres et de la lumière est très naturel, les couleurs sont denses, donnant du corps aux personnages, décors et arrière-plan. Les dessins, dynamiques, ont un côté manga dans l’attachement à traduire les émotions. Le découpage est soigné, c’est une belle édition, avec ses pleines pages, ses plans horizontaux, verticaux ou même obliques. Le carnet de recherche nous dévoile un travail remarquable sur les tenues. Faunes, flores et paysages ne sont pas en reste. Un délice!

Très bien mené, Mortesève nous parle de l’avidité des hommes, capables de mettre en péril leur propre univers pour plus de puissance. Fable écologique et saga d’aventure, cette bande dessinée dévoile un univers à part entière, qui n’appelle qu’à être découvert !

Chronique de Mélanie Huguet – Friedel.


© Casterman, 2023.

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