L’homme en noir de Grégory Panaccione et Giovanni De Gregorio, sorti dans la collection Mirages des Éditions Delcourt, n’est pas un titre dont on se libère facilement. La couverture intrigue et provoque une sorte de malaise. Ce gamin recouvert par cet homme tout en noir a quelque chose d’oppressant. Les premières pages accentuent encore plus cette sensation.
Mattéo a le sommeil habité de cauchemars. Toujours les mêmes. Ils reviennent inlassablement. Une figure obscure lui rend visite toutes les nuits dans sa chambre et l’effraie. Le matin, encore tout ensommeillé, il essaie de cacher sa mauvaise nuitée. Ses parents ne sont pas dupes, mais ils n’ont pas vraiment envie d’en parler.
Heureusement, dès qu’il se lève, son chien Tommy met tout en œuvre pour lui changer les idées. Pour se rendre à l’école, il retrouve son pote Ivan, qui, tous les jours de la semaine l’attend pour faire le chemin à ses côtés. Hors de chez lui tout parait normal. Il vit sa vie d’écolier, s’amuse et rigole. Après les cours, il retrouve sa maison, sa famille et son compagnon à quatre pattes. Il fait ses devoirs, joue avec ses figurines de super-héros, regarde des dessins animés et dîne. En soi, des journées plutôt banales. Pourtant, à un moment donné, il est obligé de rejoindre sa chambre qu’il a quitté le matin avec tant de plaisir. Un peu à reculons, après plusieurs histoires, il doit se faire une raison et se coucher. Il a peur, car il sait que ça va recommencer.
Conscient qu’ils doivent lui venir en aide, son papa et sa maman prennent la décision de lui faire consulter une psy. Le petit bonhomme ne trouve pas les mots pour se confier. Tout en douceur, la dame l’encourage. Il voudrait raconter, mais les adultes seraient-ils capables de croire à son récit ? Les semaines passent et se ressemblent. Sa frayeur et son désarroi ne font qu’augmenter. Il en vient à voir le « monstre » partout, même éveillé.
Un jour, il rentre chez lui, l’appartement est vide. Son père et sa mère lui ont laissé un mot. Tommy n’était pas bien, ils ont dû l’emmener chez le vétérinaire, mais pas de panique, son tonton arrive pour lui tenir compagnie … Le loup aurait-il pris place dans la bergerie…
On a certainement oublié qu’avant de scénariser de la bande dessinée jeunesse, Giovanni Di Gregorio, a signé Brancaccio : chronique d’une mafia ordinaire au côté de de Claudio Stassi chez Casterman BD. Lorsque l’on entend parler de lui, c’est plutôt pour la série à succès Les sœurs Grémillet aux Éditions Dupuis, dont le tome 6 paraîtra en août 2024. Ce changement de style est déconcertant. On connaît Grégory Panaccione pour ses titres sans texte telles que : Un océan d’amour ou Match. En 2023 parait La petite lumière. J’y découvre une palette de teintes plus sombres. Avec L’homme en noir, il a su composer des planches aux allures enfantines, un peu à la Bill Watterson, qui donnent une impression d’insouciance et de légèreté et d’autres ombragées, soulignées de noirceurs, qui oppressent et inquiètent. Cet assemblage est extrêmement réussi et nous procure le trouble recherché.
Je vous avais parlé, il n’y a pas si longtemps, de Grand Silence de Sandrine Revel et Théa Rojzman publié par Éditions Glénat BD. Nous avons là deux ouvrages qui se rejoignent sur l’importance d’aborder un sujet que trop de personnes aimeraient ignorer.
Nos proches peuvent être nos pires ennemis et cela, il n’est pas agréable de l’admettre…
Chronique de Nathalie Bétrix


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