GARÇONS MANQUÉS

Garçons manqués, c’est le dernier bébé de James chez Fluide Glacial ; un projet de longue haleine, rangé et ressorti plusieurs fois depuis 17 ans.

C’est Charlie et Malcolm. Deux mouflets qui se croisent au parc et dont les parents, se rapprochant très fort, les obligent, le temps passant, à une cohabitation obligatoire. Au fil des saisons, on suit une année de leurs vies d’enfant, une année de choix de leurs parents ; le monde d’aujourd’hui au travers du prisme de leur candeur. Et ça fonctionne super bien.

Des sunday-strips de six cases qui s’enchainent au rythme de deux par planche ; une mise en page aux vignettes carrées, aérée et très lisible. Le tout dans un format traditionnel à la couverture cartonnée. L’influence du comic-strip ne s’arrête pas à la mise en forme, on la retrouve aussi dans la palette graphique très épurée et dans l’utilisation du Benday Dots, autrement dit l’usage d’une forme de pointillisme, ici en orange, blanc et noir. Quelques à-plats des mêmes couleurs, un trait noir sobre et efficace, un habile contraste des trames et des densités de points et Malcolm et Charlie prennent vie. Simplicité n’est pas simplisme.

Ces deux p’tits joufflus sortent des sentiers battus et cassent allégrement les stéréotypes ; dès le premier strip, on s’interroge sur ce que c’est que d’affirmer sa différence… et c’est comme ça tout au long de la lecture. L’auteur s’amuse et place dans les phylactères de nos deux petiots tantôt un second degré de bon aloi, tantôt des réflexions enfantines amusantes. Questions de géopolitique et de liberté, déconstruction des genres et égalité, place de la nature dans nos vies et société de consommation… des thématiques fortes abordées avec humour et légèreté. En filigrane, c’est également ce que c’est que de grandir qui est évoqué ainsi que le regard que les enfants peuvent porter sur les comportements des adultes qui les entourent. Jamais n’apparaissent dans les cases les parents de Malcolm et Charlotte mais au travers des mots de leurs enfants, on les imagine très bien !

Sur la couverture, nos deux « garçons manqués » apparaissent au milieu d’un pictogramme mêlant les caractéristiques des gender symbols habituels remaniés par James… j’aime bien imaginer que ce nouveau glyphe puissent signifier simplement « humain »…

En somme, cette bande dessinée est une grosse bouffée de tendresse et de sourires ; de réflexions aussi, judicieusement suscitées autour des cases. Une lecture intelligente à l’humour tendre et touchant que forcément je vous conseille…

Chronique de Louna Angèle

© Fluide Glacial, 2024.

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