THE AMBASSADORS

Mark Millar a un sacré CV, sa liste des hits est sans fin. Il a imaginé un nombre impressionnant de best-sellers comme The Authority V2, Superman : Red Son, Wolverine : Ennemi d’état et Old Man Logan, Ultimate X-Men, The Ultimates , Civil War, Wanted, Kick-Ass, Hit-Girl, Superior, Jupiter’s Legacy/Circle, Starlight, Empress, The Magic Order et etc. La relance de Némésis en mode Reloaded s’accompagne de The Ambassadors aux éditions Panini Comics, le trublion de la bande dessinée américaine confirme l’unification de son label Millarworld/Netflix avec brio.

La scientifique Choon-He Chung a percé le secret du génome du surhomme, des années de recherches intensives lui ont permis d’avoir accès à une base de données de superpouvoirs quasi illimitée. Son but ultime est d’offrir ces capacités hors du commun à l’humanité.

Elle fait une annonce mondiale de ses découvertes à l’aide d’un simple téléphone depuis le fond de sa cellule.

Notre Houdini de la génétique réussira l’exploit de s’évader de prison de manière spectaculaire. Jing-Sun son ex de cœur, prend cette fuite sous le feu des projecteurs comme un magnifique doigt d’honneur.

Jing-Sun et Choon-He Chung formaient un couple de savants détonants à l’avant-garde de l’expérimentation mais des désaccords sont rapidement apparus entre eux. Elle souhaitait aider son prochain tandis que sa moitié ne pensait qu’à la pluie de billets verts que lui rapporterait leur découverte. Il complota et piégea sa femme pour un aller simple à perpétuité sans remise de peine.

Seulement voilà, Choon-He est le cerveau supérieur du duo. Maintenant libre, elle peut se dévouer corps et âme à son idéal utopique. Elle désire recruter des gens de la rue, des anonymes qui renonceraient à leur intérêt personnel et qui seraient prêts à faire preuve d’une abnégation sans faille. Qu’importe qu’ils soient des vendeurs de portables, réceptionnistes d’hôtels miteux ou vieillards séniles. Les élus représenteront leur pays et défendront la planète de n’importe quelle menace ou catastrophe.

Jing-Sun a un point de vue différent sur la question. Il pense que ces facultés ne devraient profiter qu’à une élite. Celle qui possède déjà les banques, médias et grosses entreprises.

L’altruisme déterre la hache de guerre face au capitalisme, le conflit risque de trouver un épilogue sanglant.

Le sale gosse de Glasgow baigne dans le comics US depuis l’enfance et n’a pas la prétention de vouloir réinventer la roue. Il s’approprie et remanie des concepts déjà existants pour les dynamiser (dynamiter plutôt) afin d’allier la modernité à la flamboyance dans une cadence infernale. Le scénariste mêle la portée politique au super-héroïsme, ce mixte confère un ton irrévérencieux à sa dernière création. Il dépeint des personnages violents et cyniques motivés par un élan de justice un chouïa sauvage, The Ambassadors se perçoit comme un récit qui traite du changement et de la rédemption. Mark Millar est un conteur émérite, ses écrits ne respectent aucune morale ni aucune limite. Ils allient la transgression au divertissement, l’auteur crache ses valdas et ne ménage pas son lectorat.

Mark Millar sait s’entourer de la crème des artistes. Frank Quitely, notre Olivier Coipel national, les Matteo Scalera et Buffagni, Karl Kerschl ainsi que le trop rare Travis Charest se relaient au crayon. L’esthétique multiple est intense, nos stars du critérium s’en donnent à cœur-joie à tout bout de planche. La virtuosité du mouvement mariée au séquençage précis de Quitely ensorcelle le gaufrier. Kerschl et Scalera optent pour un graphisme feel-good léger en encre de chine et mis en couleur directe. Charest quant à lui, fournit un dessin millimétré qu’il fusionne à sa minutie quasi obsessionnelle pour les décors archi-détaillés. Coipel applique une ligne aussi séductrice qu’expressive qu’il rehausse d’un encrage sobre. Buffagni croque de manière plus décontractée, son style suivi du passage au noir lorgnent du côté de l’épure. L’italien favorise un découpage ravageur s’étalant en format splash page. Michelle Assarasakorn, Dave Stewart et Lee Loughridge leur prêtent volontiers la main pour la colorisation. Ils fournissent un travail de titan à la fois léché et chatoyant. Les nuances se déploient de façon organique voire magnifiquement atmosphérique. Chacun apporte son savoir-faire et son adresse colorée pour embellir une composition variée diablement solide. Le titre donne la possibilité aux illustrateurs de chorégraphier des séquences d’action et combats insensés à une échelle démesurée.

Certains pourront reprocher une conclusion un peu trop «brutale», rien ne vaut un pas de recul suivi d’une bonne droite comme grand final. Aucun doute, Mark Millar ne laisse personne indifférent. Night Club et The Magic Order T4 sont annoncés pour les semaines à venir en attendant le plat de résistance que sera le crossover Big Game prévu cet été. Ma PAL est en joie !

Chronique de Vincent Lapalus

©Panini Comics, 2024.

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