Le Meunier Hurlant

Le meunier hurlant c’est la formidable adaptation par Nicolas Dumontheuil d’un roman d’Arto Paasilinna, un écrivain Finlandais qu’il adore, dont il se sent proche et apprécie le côté loufoque, joyeux, absurde, plein de vie et désenchanté.

C’est la seconde fois que le bédéiste s’empare d’ un livre de cet auteur réputé et ça lui réussit.

Il a lu tous ses récits et admire sa mécanique de scénario ultra précise qu’il a décidé de respecter avec fidélité. Pour cet opus, il a simplement ajouté une page introductive éclairante et quelques dialogues.

Ce texte l’a immédiatement attiré car il lui offrait l’opportunité de développer un univers graphique assez extraordinaire tout en mettant en avant une thématique inépuisable.

Dans ce roman graphique généreux, Il anime un personnage excentrique, doux, rêveur qui a un léger grain. Revenu un peu cabossé de la guerre, l’homme s’installe dans un village reculé du Nord de la Finlande, en Laponie et il entreprend avec succès de reconstruire le moulin.

D’abord bien accepté, ce Don Quichotte avenant et attachant devient soudain pour des raisons assez obscures, l’ennemi public numéro un. Toute la communauté se dresse contre lui. Il déchaîne la colère des habitants, une avalanche de bêtises, une intolérance crasse et un rejet primitif.

Mais le grand Agnar Huttunen ne baissera pas les bras et réagira avec pugnacité. Il connaîtra l’amour d’une belle conseillère horticole et l’amitié inattendue de quelques originaux et même d’un flic aussi humain que sympathique.

Bien que cette comédie dramatique soit un peu triste, sombre et mélancolique elle est aussi truculente avec des personnages hyper expressifs qui sont tous vivants, pittoresques. Il y a aussi un côté western plaisant et quelques répliques piquantes

Après avoir élaboré un story-board précis, l’artiste s’est lancé dans un découpage savoureux avec des cases tracées à la main aux formats variés, des respirations et une grande attention réservée aux décors.

L’illustrateur varie les angles de vue, use de gros plans, réalise son lettrage à la main.

Son dessin traditionnel très lâché n’est ni rigoureux, ni précis mais il dégage un charme fou. Que ce soit les maisons, les édifices ou les décors forestiers, on en prend plein les yeux du début à la fin. On y perçoit les petites imperfections mais on décèle rapidement de l’enthousiasme et du plaisir. On est embarqués par un style fluide et une technique au lavis très maîtrisée avec des teintes sépia chaleureuses ajoutées ici et là. 

Le meunier hurlant , la dernière bande dessinée de Nicolas Dumontheuil éditée par Futuropolis, c’est une charge grinçante contre la connerie humaine et l’hystérie collective qui arrive parfois sans crier gare. C’est aussi l’éloge du retour à la nature et un opus qui excelle pour traiter par le rire de sujets graves.

C’est un livre somptueux, le fruit d’ une rencontre un peu magique entre un écrit intemporel, puissant et une mise en cases fabuleuse.

Chronique de Stéphane Berducat.

© Futuropolis, 2024.

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