LE MONDE DE PICKTO

Alerte !!! Que personne ne sorte !!! Inadmissible détournement de conte de fée !!! Mon âme de princesse n’y survivra pas !!! Je sens déjà que je défaille…

Evidemment, je déconne, hein ! Primo, dans un conte de fée, j’serais pas une princesse… à la rigueur un dragon ou une nymphette des bois 😊… Et secundo, j’adore qu’on tortille le cou aux stéréotypes en tous genres, et c’est exactement ce que nous propose Michel Alzéal dans Le monde de Pickto.

Dans cet OVNI assumé de la planète BD, paru chez Editions Paquet, l’auteur, scénariste et dessinateur, s’affranchit tout bonnement des codes classiques tant sur le fond que sur la forme et nous balade dans une relecture décalée et contemporaine de « La belle au bois dormant ».

Cette bande dessinée, c’est 64 pages d’à-plats en tons de jaune et bleu, contrastes en blanc et noir mat, des personnages aux silhouettes simplifiées et sans contours, des décors stylisés et des fonds unis, une mise en page inventive (mention spéciale pour le dragon qui se retrouve pouce en l’air, accoudé au rebord calciné d’une vignette après avoir fait roussir la mise en page…), plein d’astuces visuelles pour rendre le tout hyper lisible et bien sûr des bulles… mais sans un mot.

Vous avez bien lu, pas un mot écrit dans Le monde de Pickto mais des pictogrammes !

Quelque part entre le dessin et le schéma, habituellement utilitaire, conçu pour délivrer rapidement une information pratique facilement identifiable, compréhensible de façon « universelle » sans avoir recours à l’écrit, la langue ou la culture du destinataire, le pictogramme est ici vecteur de narration, de moyen de communiquer une fiction, de faire fleurir l’imagination… et ça fonctionne hyper bien ! Quelques pictogrammes noirs dans des phylactères basiques et Michel Alzéal raconte toute une histoire…

Histoire, d’ailleurs, que je me refuse à vous divulguer !

Bon d’accord, deux trois petites choses pour titiller votre curiosité alors… C’est bien parce que c’est vous 😉 ! Disons simplement que, parfois, ce sont les princes qui se changent en crapauds, que Blanche-Neige a des idées derrière la tête, que Cendrillon a retrouvé sa pantoufle toute seule et que le dragon à une perche à selfies… et surtout qu’on sort de là avec la démonstration que l’amour est multiple et qu’être heureux d’aimer et d’être aimé, vaut bien qu’on dégage quelques idées reçues, même celles des contes de fée 😉.

A bien y réfléchir, à l’heure où on ponctue, sans y faire attention, nos échanges d’émojis et autres smileys, où la communication visuelle prime avec les logos, icônes, emblèmes et j’en passe, raconter une histoire en pictogrammes, au-delà de l’exercice de style, était un joli défi… relevé ici haut la main avec efficacité créative, humanité, regard positif et pas mal d’humour.

Vous l’aurez compris, pour le dépaysement graphique comme pour la revisite scénaristique, je vous engage à aller traîner vos guêtres dans cet anti-conte de fée dopé aux pictogrammes et aux allures de fable moderne… en plus vous y croiserez les Beatles 😊.

Chronique de Louna Angèle.

©Éditions Paquet, 2023.

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