AQUAMAN : ANDROMEDA

L’homme a toujours rêvé de conquêtes spatiales, de s’envoyer en l’air au mépris du danger. Et si la menace provenait des océans et non des étoiles ? Aquaman : Andromeda de Ram V et Christian Ward aux éditions Urban Comics est un titre qui s’aborde comme un thriller hypothermique et claustrophobique.

Un objet non identifié s’est écrasé sur l’îlot de Motu Nui dans le Pacifique. Ce coin est un cimetière, une décharge éloignée de lieu terrestre qui sert aux programmes aérospatiaux pour y laisser pourrir leurs déchets. Le seul problème est que ce satellite inconnu serait de nature extraterrestre.

Une équipe est dépêchée. Elle est constituée de la crème des chercheurs ainsi que des meilleurs soldats afin d’établir un premier contact voire d’évaluer les risques potentiels. A peine embarqué à l’intérieur du sous-marin Andromeda, le groupe est témoin de la destruction de son navire de soutien par un Kraken. Le submersible se retrouve isolé et n’a plus d’autre choix que de continuer la mission.

La tension monte d’un cran, nos marins improvisés commencent à ressentir le mal des profondeurs et des dissensions éclatent parmi eux. La carcasse échouée dégage de mauvaises ondes, elle accentue la panique à bord et réveille les pires cauchemars des occupants. Le corps céleste renfermerait la calamité responsable de l’effondrement de la cité d’Atlantide. À la base, cette découverte devait permettre de faire avancer la recherche et l’armée y trouvait un intérêt militaire. L’appât du gain motive également des pirates, la situation dégénère et le problème vire à la catastrophe internationale.

Pourtant, un mystérieux protecteur apparaît. Cette autorité silencieuse et bienveillante contribuera à désamorcer le conflit, l’équipage ne se doute pas qu’il est sous la protection du Prince des mers.

Exit la trinité formée de Batman, Superman et Wonder-Woman. Ram V se penche sur Arthur Currie. L’auteur rédige une aventure dépressurisée, sa vision lorgne plutôt vers le récit populaire et surtout fabuleux. C’est un écrivain adroit qui met en scène un demi-dieu aux prises avec une force surnaturelle colossale. Ram V jongle avec la symbolique des énergies et des puissances en jeu, il incorpore un large spectre de la condition humaine saupoudré d’un message écologique. Aquaman est-il une légende, une fable ou un mythe aux yeux des gens ? La réponse est un melting-pot d’idées dans l’approche et l’imaginaire du scénariste. Rien que le titre de l’album plonge d’emblée le lecteur dans le grand bain.

Christian Ward prend en charge la totalité de la partie graphique. Le dessin, l’encrage et la colorisation sont entièrement exécutés à la tablette graphique. L’illustrateur propose une mise en page immersive. Elle est à la fois synthétique, sophistiquée et souple. Le style visuel se caractérise par un défilé fluide, il installe une atmosphère froide et tétanisante. Le crayonné et son passage au noir sont rudimentaires et limpides, les décors sont esquissés dans un esprit d’épure. Les designs iconiques reflètent les ingrédients de science-fiction omniprésents, la conception des engins maritimes accentue la singularité de l’histoire. Christian Ward attire l’attention sur le découpage et la pigmentation numérique. Le séquençage déferle tel un tsunami. Une majorité de planches comporte son lot de cases en forme de vaguelettes pour représenter le mouvement perpétuel de l’eau, les perspectives sèment le trouble. Les nuances déploient différents effets en rapport avec l’élément liquide. Les bleus et verts inondent la composition avec amplitude en s’aidant de dégradés variés. La technique donne un résultat translucide, l’image gagne en impact.

Au final, Aquaman : Andromeda se révèle être une rencontre du troisième type aquatique aussi horrifique que cosmique. Ce one-shot promet une lecture en apnée.

Chronique de Vincent Lapalus.

© Urban Comics, 2023.

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